dimanche 28 février 2010

Février 2010 : 23 nouveautés et rééditions


Chaque début de mois vous trouverez la liste la plus exhaustive possible des sorties polar, tous genres confondus, (R)ééditions comprises. En attendant de retrouver mes chroniques pour certains de ces titres, vous pouvez toujours aller faire un tour sur les sites des éditeurs pour plus de détails sur ces albums.
En bas de liste, un clic sur "sorties du mois" permettra de retrouver l'ensemble des messages sur les sorties mensuelles. Rendez vous début avril pour les sorties de mars.

BAMBOO
La Main du singe 2 - (Laumaillé) – 12,90 €

DARGAUD
Al' Togo 5 : Cissie M'Natogo - (Morvan et Savoia) – 10,95 €

DELCOURT
La Madone de Pellini 1 : Lamb House - (Riviere et Federici) - 12,90 €

DES RONDS DANS L'O
Tueuse – (May) – 15,50 €

DUPUIS
Jour de grâce – (Jakupi et N'Guessan) – 14,50 €
(R) – Jessica Blandy (Intégrale 1) – Renaud et Dufaux – 19 € (Petit format)
(R) – Jerome K. Jerome Bloche (Intégrale 1) – Dodier, Le Tendre et Makyo – 19 € (Petit format)
(R) – Le Choucas (Intégrale 1) – Lax – 18 € (Petit format)
(R) – Ethan Ringler (Intégrale) – Filippi et Mezzomo – 19 € (Petit format)

EP
Agatha Christie 19 - La Maison du péril - (Quella-Guyot et Jollet) - 11 €

GLENAT
Le Narval 1 : L'Homme de fond - (Supiot et Beuzelin) – 9,90 €
Havank 2 : L'Ombre perd pied - (Danier) – 9,40 €
H.H. Holmes 2 : White city – (Fabuel et Le Hénanff) – 13 €
(R) – De silence et de sang : intégrale 2 – (Corteggiani et Mitton) – 15 €

LOMBARD
Rubine 12 : le lac Wakanala – (Mythic et Di Sano) – 9,45 €
All watcher 2 : La Nébuleuse Roxana – (Desberg et Koller) – 10,40 €
Les Carnets de Darwin 1 : l'oeil des Celtes – (Runberg et Ocana) – 13,50 €

MILADY
Grandville – (Talbot) – 15,90 €

MOSQUITO
Di Cazzo contre les maîtres du monde - (Coutelis et Fioretto) - 13 €

PANINI comics
The loosers 1 – La Main du mort (Digle et Jock) – 29 €

SOLEIL
Sherlock Holmes et les vampires de Londres 1 - (Cordurié et Laci) - 13,50 €
Leo Loden 19 – Speculoos à la plancha
- (Arleston et Carrere) - 9,95 €
Le Saigneur de Tiffauges – (Corbeyran et Horne) – 12,90 €





Traffic 2 - Echelle (2010)

Paskal est membre d'Echelle, organisme tentaculaire et secret qui jugule les flots d'informations parcourant la planète. Ce contrôle des médias visant à manipuler l'opinion publique, qui passe par des voies inconnues de la population, ne doit pas souffrir du moindre grain de sable. Le rôle de Paskal, unité anonyme d'Echelle, est de veiller sur le faisceau informatif concernant le transport ferroviaire européen. Domaine sensible au moment de l'ouverture du trafic des voyageurs à la concurrence internationale, avec les JO de Londres en ligne de mire. Homme marié et père de famille tranquille, Paskal va vite se retrouver au coeur de l'action lorsqu'il alerté du vol de la planification des horaires d'Eurotunnel. Le suspect est vite identifié, puisque ce n'est autre qu'un ancien membre d'Echelle, Bogdan, devenu héroïnomane, et jouant désormais sa propre carte. Paskal le connaît bien, pour avoir partagé avec lui des missions en ex-Yougoslavie. Et un jeu du chat et de la souris s'engage entre les deux hommes, à travers l'Europe... du présent et du passé.

Après « Course contre la montre », voici le deuxième voyage à bord de la série « Traffic ».
Moins haletant que celui de Robin, le scénario de Damien Marie n'en demeure pas moins riche en rebondissements. Il repose sur le même principe d'un homme seul faisant face à un danger imminent, et devant agir vite pour déjouer le piège tendu par le méchant de l'histoire. Mais ici, la frontière est ténue entre le Bien et le Mal, du simple fait que le héros appartienne à une entité monstrueuse aux buts ambigüs. Il n'est pas difficile de faire le parallèle entre l'Echelle de Damien Marie et le Réseau Echelon, système mondial d'interception des communications privées et publiques, mis en place par les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, l'Australie et le Nouvelle-Zélande, et dont les objectifs ne sont guère plus reluisants. Rien que pour cet aspect du scénario, cet album mérite d'être lu, car Marie rappelle avec habileté – car il ne tombe pas dans la récurrente « théorie du complot » - qu'il peut-être facile de manipuler l'information, à une très grande échelle.
Michel Espinosa s'est très bien emparé de cette histoire, et son trait vif convient bien à la série. Curieusement, les scènes ferroviaires sont assez peu nombreuses dans ce deuxième voyage : pour mieux revenir dans le troisième tome ? Cet opus vaut en tous cas lui aussi le détour.
Et n'oubliez pas : si vous êtes dans la région, vous pourrez discuter de cet album avec son dessinateur au 5ème salon de Bon Encontre.

Traffic 2 – Echelle (2010)
Scénario Damien Marie et dessin Michel Espinosa
Bamboo, 2010 – 48 p. couleur – Collection Focus - 12,90 €

Traffic 1 - Course contre la montre (2009)

Makkal Nadeïev est conducteur de trains. Il se réveille un matin pas tout à fait dans son assiette : son pantalon est souillé de sang, et sa peau est grossièrement recousue à deux endroits, sur la tempe et à l'abdomen. Deux incisions qu'il n'avait pas la veille et dont il ne souvient absolument pas de l'origine. Il ne va pas rester longtemps dans l'incertitude car une voix s'immisce très vite dans son crâne pour lui révéler ce qu'il a subi durant la nuit : la pose d'un micro émetteur-récepteur dans sa tête, et celle d'une mini-bombe programmée pour exploser dans onze heures et cinquante-quatre minutes. Le délai qu'aura Makkal pour voler le prototype d'une loco ultra-moderne, guidé par son mystérieux chirurgien-terroriste...

Ce premier opus est celui d'une nouvelle série entièrement axée autour du train, réalisée par un collectif d'auteurs, et dont chacun des épisodes pourra se lire de manière indépendante. Le duo Robin – Kerfriden ouvre le bal par une histoire très rythmée, sur fond d'espionnage industriel. La course contre la montre dont il est question dans le titre n'est pas sans rappeler celle de films comme « Speed » ou « 58 minutes pour vivre », et de ce point de vue, le pari du thriller au coeur de la SNCF, pas gagné d'avance, est réussi. Les personnages sont crédibles dès lors qu'on accepte le postulat de base et ont des comportements tout à fait adaptés aux événements qu'ils doivent traverser. Le style réaliste de Kerfriden est efficace sur ce genre d'histoire, et c'est d'ailleurs lui qui a aussi dessiné, le mini-récit de 8 planches (scénarisé par Hervé Richez) qui figure en page de garde de l'album : une « bande annonce » qui fait le lien entre tous les tomes à venir de « Traffic », et où tous les personnages se croisent sur le quai, puis à bord d'un TGV. L'unité visuelle de la série sera aussi assurée par les couvertures, toutes signées Jean Giraud. Cette première étape donne envie de poursuivre le voyage.
Plus d'info sur la série : un petit tour sur le mini-site qui lui est consacré.


Traffic 1 - Course contre la montre
Scénario Alexis Robin – Dessin Malo Kerfriden
Bamboo, 2009 - 48 p. couleur - Collection Focus – 10,40 €

vendredi 26 février 2010

Hommage : Antonio Lapone dessine le Freddy Lombard de Chaland

Gotfermilliard de nom de djue ! L'intrépide Freddy Lombard aurait-il découvert un crime ? A qui sont ces bijoux oubliés au beau milieu de ces taches de sang ? Le mystère restera entier car ce dessin d'Antonio Lapone n'est autre qu'une sérigraphie réalisée pour le Club des Amis de Freddy, vénérable association dont tout fan de Chaland se doit d'être membre. Outre un petit journal annuel très soigné, l'heureux cotisant reçoit des petits cadeaux tout au long de l'année, de quoi entretenir sa flamme chalandienne.
Un petit tour sur le blog d'Antonio Lapone, également auteur de la carte de voeux 2010 du club, ravira aussi tous les amateurs de la grande famille de la ligne claire.
Et si vous ne savez pas qui est Yves Chaland, une visite sur le site qui lui est consacré éclairera votre lanterne. Quant à moi, il me faudra bien revenir un jour sur les deux personnages les plus "polar" de Chaland : Bob Fish et Freddy Lombard.



jeudi 25 février 2010

Kaplan et Masson 1 - La Théorie du chaos (2009)

1956, Paris. Le professeur Bernstein, savant atomiste, se fait assassiner à la veille de son important discours sur la non-utilisation de l'arme nucléaire. Hanté par le souvenir d'Hiroshima et Nagasaki, son ami Purcell avait réussi à convaincre d'autres savants du monde entier, et un milliardaire grec, Yorgos, à monter une conférence de la paix autour de ce sujet. Mais Yorgos est assassiné à son tour, au moment où le lieutenant-colonel Kaplan, des services secrets français, allait à sa rencontre. Deux meurtres rapprochés qui ne laissent aucun doute sur l'entreprise de sabotage de la conférence... Mais qui peut bien connaître les noms des savants pacifistes jusque-là tenus secrets ? Avec l'aide du scientifique Nathan Masson, Kaplan se charge de l'affaire.

Didier Convard, scénariste reconnu pour ses intrigues sur fond historique, nous replonge, avec cette nouvelle série, au coeur de la Guerre Froide, avec ce qu'il faut de détails pour que le lecteur se retrouve dès les premières pages dans le Paris et l'Europe des années 50. Le style très ligne claire de Jean-Christophe Thibert renforce ce côté « rétro », et graphiquement, l'album est à rapprocher du Floc'h de « Blitzkrieg » ou du « Dossier Harding ». Son rythme est cependant un peu plus trépidant, du fait même du statut de Kaplan : espion n'est pas un métier de tout repos en ces années d'après-guerre. Les « affaires » de l'époque – tout comme la figure même de l'agent secret - sont d'ailleurs passées dans un imaginaire collectif, auquel les auteurs font largement appel. Il n'est d'ailleurs pas interdit de voir aussi dans leur série un hommage aux romans d'espionnage du Fleuve Noir dont Coplan était l'une des vedettes.

Kaplan et Masson 1 – La Théorie du Chaos
Scénario Didier Convard et dessin Jeann-Christophe Thibert
Glénat, 2009 – 56 pages couleur – (Collection Caractère) – 13 €

lundi 22 février 2010

Le Casse 1 - Diamond (2010)

Sibérie, région de Kouzbass, 2009. Deux hommes, Andy Chipperfield, américain, et Sergueï, russe, atteignent enfin la petite ville d'Askashaya, au terme d'un périple automobile épuisant. Ils sont là pour se faire recruter le premier comme comptable, et le second comme mineur, dans la mine de diamants de la ville. Les deux hommes se séparent avant même de franchir le panneau d'entrée d'Askashaya : il ne s'agit pas pour eux d'être vus ensemble. Ils sont là sous de fausses identités, et doivent mettre en oeuvre le plan qui permettra à leurs complices de mettre la main sur un million et demi de dollars de diamants. En observant le parcours des convois qui quittent tous les deux mois la mine, et en déjouant leur système de protection sophistiqué, les deux hommes doivent préparer le terrain à une opération commando de l'extrême, dans des conditions naturelles plus que délicates.



Diamond inaugure la nouvelle série-concept imaginée par David Chauvel sur le thème du casse. Chaque histoire relatera celle d'un braquage audacieux, en des lieux et époques complètement différentes. Christophe Bec ouvre donc le bal en imaginant cette histoire de vol de diamants en plein environnement hostile. On retrouve là la prédilection de cet auteur pour les histoires mettant en scène l'homme face à une nature menaçante et oppressante. C'est un dessinateur anglais, Dylan Teague, oeuvrant entre autres sur Judge Dredd, qui a été choisi pour mettre en images ce braquage à la sibérienne. Force est de constater que ce choix fut judicieux : ses paysages nocturnes sont glacés à souhait, et sa mine de diamants – des bâtiments extérieurs aux entrailles souterraines – est tout à fait réussie. Sa scène sous-marine, point d'orgue du plan patiemment ourdi, est le morceau de bravoure de l'album et donne d'ailleurs matière à une couverture particulièrement réussie. Mais si ce premier opus donne envie de voir ce que donneront les autres, c'est aussi parce qu'en expert de la chose scénaristique, Bec a ménagé son lecteur jusqu'aux toutes dernières pages, et... à vous de découvrir comment se termine ce premier « Casse ».
Et rendez-vous en l'an 30, à Jérusalem, pour le deuxiè
me...


Le Casse 1 – Diamond, Askashaya, Sibérie 2009
Scénario Christophe Bec et dessin Dylan Teague
Couleurs Araldi.
Delcourt, 2010 – 64 p. coul. - Collection Conquistador - 14,95 €

vendredi 19 février 2010

Janvier 2010 : 37 nouveautés et rééditions

Chaque début de mois - bon ok, le 19, on a fait mieux comme début - vous trouverez la liste la plus exhaustive possible des sorties polar, tous genres confondus, (R)ééditions comprises. En attendant de retrouver mes chroniques pour certains de ces titres, vous pouvez toujours aller faire un tour sur les sites des éditeurs pour plus de détails sur ces albums.
En bas de liste, un clic sur "sorties du mois" permettra de retrouver l'ensemble des messages sur les sorties mensuelles. Rendez vous début mars - allez, soyons fous : disons lundi 1er - pour les sorties de février.

BAMBOO
Le Chineur 1 - (Betaucourt et Pagot) - 12,90 €
Traffic 2 - (Espinosa et Marie) – 12,90 €
Borderline 3 – (Berr et Robin) – 12,90 €


BAYARD
Theo Toutou 7 : Nuit Patchoule Nuit Maboule - (Pommaux) - 8,90 €
Inspecteur Bayard 18 : Trafic En Afrique – (Schwarz et Fonteneau) - 8,90 €



CASTERMAN
Les Mondes Perdus de Conan Doyle 2 : Le Royaume des morts - (Deubelbeiss et Tramaux) - 11,50 €
L'Espion de Staline - (Kreitz) - 16 €
Assassins 2 : Le Vampire de Düsseldorf - (Puchol et Rodolphe) - 10,40 €
Noirhomme 3 : Echecs et mat – (Hamo et Maurel) – 10,40 €
(R) - Fog (Intégrale 1) – (Seite et /Bonin) - 16 € (Petit format)
(R) - Canardo (Intégrale 1) - (Sokal) - 16 € (Petit format)
(R) - Le Tueur (Intégrale 2) – (Jacamon et Matz) - 16 € (Petit format)

KSTR
Hamlet 1977 - (Vaughn et Ravard) - 16 €
Bloody September - (Argunas ) - 16 €





DARGAUD
Black Op 6 – Desberg et Labiano - 13,50 €
Ghost Money 2 : Les Yeux de Chamza (Smolderen et Bertail) - 13,50 €
(R) - Mic Mac Adam (Intégrale 4) : Le Livre Des Cendres – (Brunschwig et Benn) - 37,00 €

DELCOURT
Le Casse 1 : Diamond
(
Bec et Teague) - 14,95 €




DUPUIS
Jeremiah 29 : Le Petit chat est mort (Hermann) - 10,95 €
Hélas ! - (Bourhis et Spiessert) – 15 €
(R) - Jeremiah (Intégrale.7) – (Hermann) - 37 €
(R) - Largo Winch (Diptyque 1) (Van Hamme et Francq) - 22 €
(R) - Largo Winch (Diptyque 2) (Van Hamme et Francq) - 22 €



LES ENFANTS ROUGES

Tropique de l'agneau
(MKDeville et Nicloux) - 18 €





GLENAT
Saint-Germain 2 : Le Marquis de l'ombre ( Gloris et Bergeron) - 13 €
Junk 2 : Pay back – (Pothier et Brüno) - 13 €
Diamants 3 : L'Etoile du Katanga - (Bartoll & Kolle) - 9,40 €


KANA - Mangas
Monju 6 (Myashita et Hiroki) - 7,35 €
Ushijima, L'Usurier de L'ombre 12 (Manabe et Shohei) - 7,35 €







LOMBARD
Sisco 1 - Ne tirez que sur ordre !- (Benec et Legrain) - 10,95 €
(R) - Les Casseurs (Intégrale 5) - (Duchateau et Denayer) - 18 €




PANINI comics - Comics (...)
100 Bullets 9 : Un Frisson dans la jungle - (Azzarello et Risso) - 11 €



PIKA (Senpai) - Mangas
Kurosagi livraison de cadavres 10 - (Yamazaki et Otsuka) - 7,90 €
Mpd Psycho 13 - (Tajima-& Otsuka-E) - 7,90 €





SOLEIL
Ted Bundy - (Vitti & Dobbs) - 12,90 €

Sherlock Holmes et les vampires de Londres 1 (Cordurié et Laci) – 13,50 €




VENTS D'OUEST
On me l'a enlevée - (Lambour et Springer) – 13 €

dimanche 14 février 2010

Rivages/Noir/Casterman : deuxième salve

Après un lancement réussi en 2008, avec quatre titres annonciateurs d'une collection de haute tenue, et un Prix des libraires de Bande Dessinée 2009 dès le cinquième titre (« Shutter Island » ou Lehane adapté par De Metter), Rivages/Casterman/Noir s'est enrichie en 2009 de quatre nouveautés, toutes aussi intéressantes que la première salve.

Le duo Villard / Chauzy, qui semble s'entendre comme larrons en foire, s'est donc reconstitué après leur première association pour « Rouge est ma couleur ». Moins sombre – quoique... - « La Guitare de Bo Didley » est définie par Villard himself comme « une cavalcade burlesque » que Chauzy a lui-même dessiné de manière alerte, extrêmement vivante et colorée : il fallait bien cela pour cette histoire de guitare mythique – celle de Bo Didley donc, bleue et rectangulaire – qui passe de mains en mains, chacun de ses éphèmères propriétaires en tirant profit ou... ennuis plus ou moins graves. L'une des difficultés a d'ailleurs été pour le dessinateur de « typer » toute une galerie de personnages, certains disparaissant au bout de quelques pages, le rôle principal étant dévolu à la guitare. Le travail sur le « casting » a donc été important dans cette adaptation, où le quartier cher aux deux auteurs, Belleville, est un autre élément important de l'album. Au final, l'adaptation de ce roman à rebondissements est une réussite tant au niveau du respect de la trame narrative que de l'atmosphère qui s'en dégageait. Il apparaît ici comme une évidence qu'une participation active du romancier à l'adaptation de son propre livre donne une autre dimension à celle-ci.
Marc Villard et Jean-Christophe Chauzy ont brillamment causé de cet album au Point Ephèmère (Paris) lors du 1er festival des Habits Noirs en septembre dernier et vous pouvez les réécouter sur le podcast des mêmes Habits Noirs. José-Louis Bocquet y évoque aussi l'adaptation de la Princesse du Sang de Manchette par Cabanes, un album dont je vous parlerai forcément bientôt.
Et encore plus moderne : ne ratez pas les sémillants Villard et Chauzy en images animées sur bibliosurf, toujours à propos de la "Guitare de Bo Didley".

Jacques de Loustal n'a pas travaillé avec Dennis Lehane pour « Coronado », et il a adapté seul cette nouvelle parue dans le recueil éponyme. Son choix s'est porté sur un texte sombre, une histoire qui débute par la sortie de prison de Bobby, que son père attend à la sortie du pénitencier, à bord d'un Buick volée et avec une pute sur la banquette arrière... Les retrouvailles vont vite prendre un tour étrange, où père et fils semblent chacun sur la réserve, et jouer au chat et à la souris jusqu'au bout. Découpée en cinq actes, cette bande dessinée porte la marque de fabrique loustalienne : planches de deux grandes cases – voire d'une seule – absence quasi-totale de texte narratif, personnages aux gestes et postures emprunts d'une certaine raideur... Il se dégage de tout cela une force insidieuse, une violence contenue, qui rappellent combien Loustal est doué pour mettre en scène le polar d'une manière originale et parfois déroutante.


Déroutant, et presque dérangeant même, le « Trouille » de Joe G. Pinelli l'est tout autant. Adapté par Oppel, le roman de Marc Behm raconte l'histoire de Joe Egan, joueur de poker professionnel, qui passe son temps à fuir... une femme, blonde, tout de noir vêtue, qui le poursuit depuis son enfance. Persuadé qu'il s'agit de la mort incarnée, Joe est dans un état de panique quasi-permanent, qui le fait aussi quitter du jour au lendemain les femmes dont il est amoureux... Cet état de fuite, Pinelli a choisi de le traiter en faisant lui aussi disparaître – ou presque - une caractéristique essentielle de la bande dessinée : la case. Chacune de ses planches englobe une ou plusieurs scènes, sans que les frontières en soit délilmitées autrement que par la page elle-même. Son album tient ainsi plus du long récit de voyage illustré, un long voyage vers nulle part tant le « héros » semble désemparé. Cet impression de carnet de route vers le néant est accentuée par le trait proche du crayonné choisi par Pinelli pour ses personnages comme pour ses décors, choix artistique parfaitement assumé juqu'à l'ultime planche de cet album. Avec ce « Trouille », la collection s'enrichit d'un titre atypique, et confirme qu'elle peut devenir celle de toutes les audaces et de tous les risques.
Les Habits Noirs, toujours sur la brèche, ont interviewé Joe Pinelli au dernier festival Noir sur la Ville de Lamballe, et là encore, vous pouvez écouter ce podcast fort intéressant en cliquant ici.

C'est un peu confirmé par le dernier titre paru, en octobre : « Brouillard au pont de Bihac ».
Jean-Hugues Oppel – oui, le même – voit ici deux de ses nouvelles adaptées par un nouveau venu, Gabriel Germain, qui publie ici sa première BD. « Brouillard au pont de Bihac » se déroule au cours du conflit en ex-yougoslavie : deux anciens employés de banque décident de s'emparer d'un fourgon oublié au début de la guerre et de se faire passer pour des ambulanciers pour dissimuler leur forfait. Et ils comptent bien profiter du brouillard qui s'est abattu sur la ville pour filer à l'anglaise... Dans « 58 minutes pour mourir », l'autre nouvelle adaptée, un mercenaire a pour mission de faire sauter un avion, et le problème est pour lui de réussir son coup alors que l'aéroport est sous haute surveillance, la police ayant été prévenue du futur attentat...

Pour ces deux adaptations, Gabriel Germain a opté pour un noir et blanc tout en ombres et lumières, choix assez judicieux au regard des lieux de l'action des deux nouvelles, tout particulièrement pour la première. Les moindres recoins des espaces confinés de Bihac sont ainsi mis en valeur : la cachette du sniper, l'intérieur du camion militaire, le sous-sol de la banque... Les ombres s'étendent bien entendu aux hommes, dont seuls des demi-visages sont visibles, avec des trous noirs en guise d'yeux. Véritables zombies survivants d'une guerre aveugle, ou flics aux abois dans la seconde histoire, aucune rondeur ne vient adoucir les figures, au contraire : des traits anguleux viennent accentuer la dureté des situations. Ce parti-pris d'un noir et blanc qui n'est pas sans rappeler le travail de Miller sur Sin City ou celui de certains dessinateurs de la série « Queen and Country », fait mouche pour ces adaptations et on pardonnera volontiers à Gabriel Germain quelques maladresses sur certains personnages : voici une première oeuvre prometteuse, et la première véritable incursion dans le noir et blanc du côté de Rivages/Casterman... Noir.

La Guitare de Bo Didley
Scénario Marc Villard d'après son roman et dessin Jean-Christophe Chauzy
Casterman, 2009. - 92 p. coul. - (Collection Rivages/Casterman/Noir) - 17 €
Coronado
Scénario et dessin Loustal d'après Dennis Lehane.
Casterman, 2009. - 94 p. coul. - (Collection Rivages/Casterman/Noir) - 17 €
Trouille
Scénario Jean-Hugues Oppel, d'après Marc Behm. Dessin Joe G. Pinelli.
Casterman, 2009. - 94 p. coul. - (Collection Rivages/Casterman/Noir) - 17 €
Brouillard au pont de Bihac
Scénario Jean-Hugues Oppel, d'après ses nouvelles. Dessin Gabriel Germain.

jeudi 11 février 2010

Chetville à Polar Encontre : Retour sur Sienna 1 (2008)

Alors qu'elle rentre de quatre missions nocturnes à La Paz pour la CIA – agrémentées la journée par la présentation d'un plan de restructuration présenté pour le compte de Brain Capital entraînant trente-sept mille licenciements - Sienna Mandeville manque de surprendre son mari, le très respecté Charles Mandeville, en pleine séance de manquement à sa fidélité conjugale. Elle a vite fait d'identifier la coupable, Gabrielle Chevalier, croisée quelques années plus tôt à la fac. Elles ont une explication plutôt musclée, et tout semble devoir en rester là quand survient l'assassinat de leur mentor à toutes les deux, Roberto Solis, doyen de l'Université de Yale...

Cette nouvelle série est bâtie autour d'un duo féminin chic et choc, assemblé sur le principe des deux pôles de la pile électrique et d'où les étincelles ne peuvent que jaillir... ce qui ne manque pas de se produire. Le démarrage de cette histoire est assez alambiqué, en tous cas juste ce qu'il faut pour qu'on se pose des questions, qui pourraient se résumer à une seule : qui manipule qui ? Desberg et Filmore ont situé leur scénario dans le contexte d'une Amérique post-bushienne, ce qui en fait tout le sel, à un moment où ce pays semble avoir décidé de s'être choisi une direction nouvelle avec Obama. En situant leur intrigue dans le milieu univesitaire et en y injectant une dose de mystère via la société secrète « Skull and Bones », les deux frères apportent une nouvelle pierre à l'édifice du thriller en cases. Chetville y apporte sa contribution en campant deux héroïnes assez pimpantes, et en maintenant un trait vif pour les scènes de poursuites et de combat. Ce premier tome fonctionne assez bien et s'inscrit parfaitement dans le registre action/suspense affiché par la collection Focus.

Le deuxième tome est annoncé en mars, je vous en reparlerai à sa sortie.
En attendant, voici la couverture,

et une petite-bande annonce du premier tome, pour vous mettre dans l'ambiance...


Sienna 1
Scénario Stephen Desberg et Filmore, dessin Denis Chetville
Grand angle (Bamboo), 2008 - 48 p. couleurs - Collection Focus
10,40 €

dimanche 7 février 2010

La Crème de la BD Noire à Bon-Encontre les 13 et 14 mars

Le cinquième Salon “Polar’Encontre” de Bon-Encontre se déroulera les samedi 13 et dimanche 14 mars 2010. Cela se passe au Centre Jacques Prévert de Bon-Encontre, dans le Lot-et-Garonne, tout près d’Agen. Si je vous en cause c'est que ce festival est l'un des rares dans le polar - le seul ? - à avoir autant d'auteurs de BD que de romanciers à son menu. Et rien que du beau monde :

Will Argunas, Laurent Astier, Max Cabanes, Jean-Christophe Chauzy, Chetville, Michel Espinosa, Olivier Grenson, Gunt, Horne, Alexis Laumaillie, Gilles Mezzomo, Jean-Philippe Peyraud.

C'est Laurent Astier qui a réalisé l'affiche de ce festival, avec en vedette Claire, la femme-flic de sa série du moment "Cellule Poison". Un série dont je vous ai déjà dit ici tout le bien qu'elle m'inspirait.

Et côté livres avec plein de lignes : Ingrid Astier, Laurence Biberfeld, Jeanne Desaubry, Catherine Diran, Naïri Nahapetian, Anne Secret, Lalie Walker, Marin Ledun, Michel Leydier, Marcus Malte, Claude Mesplède, Benoît Séverac, Marc Villard. (Sous réserve : Doug Headline).
Quand je vous dit qu'il y aura du beau monde.

Alors pour le week-end du 13/14 mars : votez Polar, liste Bon-Encontre !

lundi 1 février 2010

Baru primé à Angoulême : retour sur Noir (2009)

Baru le dit dans la préface à ce Noir : « Depuis, comme vous savez sans doute, les banlieues ont explosé, notamment en novembre 2005. Je n'aurais pas la prétention de revendiquer une quelconque prémonition de ces événements ». Et pourtant... ses deux récits Bonne année 2016 et Bonne année 2047, avaient été publiés respectivement en 1995 et 1998 sous un seul et même titre (Bonne année). Ils dressaient, de manière futuriste, le tableau d'une France coupée en deux, où le siphonnage de réservoirs et la course au préservatif, trésor inestimable, constituent le quotidien vital d'une jeunesse aux abois. Même si l'étendue des dégâts n'a pas encore le degré décrit par Baru dans sa France de demain, il ne semble pas loin de la vérité, et on peut être tenté de partager son pessimisme sur l'état de notre beau pays. Heureusement que ses personnages, ses héros du quotidien, ont souvent une énergie positive assez communicative et entretiennent un certain espoir. Le troisième récit Ballade irlandaise met lui en scène une idylle entre une irlandaise catholique et le chanteur irlandais, protestant, de « The Vogues », groupe pop au sommet de sa gloire. Tiré d'une nouvelle de Rodolphe, Baru en a resitué l'action au coeur du conflit irlandais, et si cette troisième histoire semble un peu en décalage par rapport au deux précédentes, elle reste dans cette même thématique chère à l'auteur, de la lutte contre l'intolérance, sous quelque forme que ce soit. Cette réédition dans la prestigieuse collection « Ecritures », agrémentée d'une intéressante préface de son auteur, est une excellente idée. Et visionnaire : un an après, Baru remporte le prestigieux Grand Prix de la Ville d'Angoulême. Pour l'ensemble de son oeuvre, bien sûr, mais il suffit de se replonger dans celle-ci pour s'en rendre compte : elle conjugue la noirceur à tous les temps. Mais pas tout le temps, car lorsque les lendemains peuvent chanter, Baru nous laisse percevoir leur musique.
Ce Grand Prix est une juste récompense pour cet auteur au parcours discret et sans faute. Baru ? Vive la classe !

Noir
Scénario et dessins Baru
Casterman, 2009 - 142 p. noir et blanc
- Collection Ecritures - 14 €