Ethan Fargo vit à Brooklyn, et il essaie d'oublier que sa vie est ratée en envoyant des balles de golf à la mer. On passe son désespoir comme on peut... Il fréquente aussi un vidéo club tenu par deux abrutis de première et c'est là, dans cet endroit sans âme, que sa vie va prendre une tournure inattendue et bizarroïde... Alors qu'il s'apprêtait à emprunter un film dégoûtant aux yeux des tenanciers (un mélo, "la mélodie du bonheur"), deux braqueurs font irruption dans la boutique, et Ethan se retrouve pris entre deux feux. Sa situation est critique, mais l'arrivée d'un cinquième larron, qui vient porter secours au duo de braqueurs guère plus finaud que les loueurs de films, le sauve d'une balle perdue... ou d'autre chose. Inexplicablement son sauveur le laisse en vie en lui confiant un DVD sans jacquette, que Fargo regarde chez lui, espérant trouver une explication à cet épisode rocambolesque. Le choc des images est violent : c'est un snuff-movie qui se défile sous ses yeux, et le film va vite précipiter Ethan dans une cascade d'événements plus ou moins plaisants pour lui...
Nihoul et Lemmens, les créateurs de l'immortel « Commando Torquemada », (deux albums chez Fluide Glacial) sont de retour, et c'est une joie immense de constater qu'ils n'ont rien perdu de leur esprit frondeur et iconoclaste pour cette nouvelle série chez Delcourt. Leur « Snuff » est bourré de références à un certain cinéma un poil décalé que les auteurs vénèrent ostensiblement : la boutique de vidéo s'appelle « Clerks », titre d'un film-culte assez méconnu de mon entourage (mais mon entourage a tort, sur ce coup-là) et le nom du héros est hommage direct aux frères Cohen. Ce premier tome repose sur une intrigue assez surprenante : un ex-dictateur sud-américain envoie un pauvre type à la recherche des responsables de la mort, atroce, de sa fille. Avec en arrière-plan, l'univers des snuff-movies... Avouez qu'il y avait là de quoi se ramasser dans les grandes largeurs avec une histoire pareille. Mais le duo en optant pour un traitement à la Tarantino, avec dialogues ciselés et scènes chocs, évite le piège de l'album glauque sur sujet glissant (une catégorie que je viens de créer à l'instant). Dès la première phrase, le lecteur – éventuellement - égaré est prévenu :
« On ne peut avoir une idée du néant, du vide absolu, si l'on n'a jamais plongé son regard dans celui d'une autruche »...
Un peu plus loin, cette conversation :
"- C'est fait. Le doigt de Dieu vient de majestueusement désigner notre ami.
- Vous pourriez arrêter de parler comme un livre de messe et être clair, pour une fois ?"
Et tout l'album est sur ce ton, légèrement décalé, mais extrêmement jubilatoire.
Côté dessin, les trognes et les physiques volontairement caricaturaux des personnages de Lemmens, font mouche et le dessinateur démontre un réel talent pour les scènes d'action, dans cet album qui est loin d'être une promenade de santé pour le « héros ».
Bref, si vous ne lisez que dix BD par an (ou moins, mais alors, là, vous avez dû arriver sur ce blog par hasard) vous aurez compris que celle-ci doit en faire partie. Amen.
Snuff 1 – La Mélodie du bonheur« On ne peut avoir une idée du néant, du vide absolu, si l'on n'a jamais plongé son regard dans celui d'une autruche »...
Un peu plus loin, cette conversation :
"- C'est fait. Le doigt de Dieu vient de majestueusement désigner notre ami.
- Vous pourriez arrêter de parler comme un livre de messe et être clair, pour une fois ?"
Et tout l'album est sur ce ton, légèrement décalé, mais extrêmement jubilatoire.
Côté dessin, les trognes et les physiques volontairement caricaturaux des personnages de Lemmens, font mouche et le dessinateur démontre un réel talent pour les scènes d'action, dans cet album qui est loin d'être une promenade de santé pour le « héros ».
Bref, si vous ne lisez que dix BD par an (ou moins, mais alors, là, vous avez dû arriver sur ce blog par hasard) vous aurez compris que celle-ci doit en faire partie. Amen.
Scénario Philippe Nihoul et dessin Xavier Lemmens
Delcourt, 2010 – 48 p. coul. - Collection Machination – 12,90 €