dimanche 25 octobre 2015

[Illustration] - Deux maîtres du Noir en couleur : Robert E. McGinnis et Miles Hyman (chez Urban Comics et Glénat)

 


Deux magnifiques livres sur l'oeuvre de deux maîtres de l'illustration viennent de paraître. 
 
Le premier - honneur aux anciens - revient sur la longue carrière de Robert E. McGinnis, et est sorti chez Urban Comics. Il est sous-titré "Crime et séduction", et on ne pouvait guère faire mieux comme accroche : voici un artiste qui a passé plus d'un demi-siècle à mettre en scène des femmes sublimes, d'abord sur les couvertures des romans policiers dont certains sont devenus des classiques (Pop. 1280 de Jim Thompson, par exemple), puis sur des affiches de cinéma (James Bond première époque, entre autres, mais aussi Il était une fois la révolution, Barbarella...), des publicités.... 
L'auteur, Art Scott, a également recueilli la parole de McGinnis, un artiste qui se confie rarement, et dont les images sont beaucoup plus célèbres que lui. A bientôt 90 ans, l'homme peint toujours, et ne semble pas prêt de vouloir s'arrêter : "Mon envie de peindre est plus forte de jour en jour. J'ai tant à faire, et j'ai parfois du mal à me décider. Par quoi commencer ? Tout m'inspire. Je vois tant de beauté autour de moi... Je me mets dans l'embarras en voulant tout peindre". Belle confession, et en attendant de voir les futures nouvelles toiles de Mc Ginnis, il faut se plonger dans ce livre, pour découvrir d'autres facettes de son immense talent, qui fait de lui un de ces grands peintres des Etats-Unis, capables non seulement de revisiter le mythe américain, mais également d'y contribuer avec son propre univers.


L'autre Américain qui a l'honneur de voir une partie de son oeuvre rassemblée, chez Glénat, pour le plaisir de nos yeux et de nos sens n'est autre que Miles Hyman, plus connu en France, notamment par les amateurs de polar, puisqu'il est l'auteur de toutes les couvertures de la série "Le Poulpe", dont on retrouve une sélection de 22 sur les plus de deux-cents parus. Jean-Bernard Pouy, dans les pages consacrées au Poulpe de ce livre, revient sur la genèse des célèbres visuels de la collection. Il s'agissait alors de "[...] proposer de belles couvertures, des illustrations qui ne soient pas des gourdonnades ou des aslaneries, ces femmes à poil sur des frigos qui avaient les beaux jours de cette littérature "populaire" que nous envisagions de rénover radicalement. [...] Nous avons osé demander à Miles Hyman, un artiste amateur de polars, qui, à l'époque, était un Napoléon qui perçait sous Bonaparte. A nos immenses surprise et satisfaction, il a tout de suite accepté. Good grief ! Hallelujah. Avec le recul, je pense qu'il n'est pas étranger au succès immédiat de la collection". 
 
C'est même une évidence, si je puis me permettre : ses images pour "Le Poulpe" donnent immédiatement envie de voir ce qui se cache derrière les ambiances mystérieuses, parfois oniriques, qu'elles suscitent.
Mais Miles Hyman n'est évidemment pas l'auteur de cet unique travail, c'en est même une toute petite partie, il suffit de tourner les deux-cents pages de ce livre pour s'en rendre compte. Il a lui aussi oeuvré pour la presse, mais également pour l'édition jeunesse, des festivals de polar. Et depuis peu, revient à la BD. De celle-ci il dit : "La bande dessinée occupe une place de plus en plus importante dans mon travail depuis quelques années. J'y découvre un terrain d'expression riche et nuancé... c'est un carrefour entre mes passions graphiques et littéraires". Michel Rime, l'auteur des textes, rappelle à point nommé qu'en matière de neuvième art, c'est sous le pseudo de Milo Daax que Miles Hyman a publié en 1987 "L'homme à deux têtes", chez Futuropolis.
Le chemin parcouru depuis est immense, et comme pour McGinnis, c'est un bonheur de contempler ses oeuvres, avec qui il partage aussi cet art de dessiner des femmes fortes et décidées. D'ailleurs, Glénat ne s'y est pas trompé : au dos de la jaquette de se "Miles Hyman, drawings", une femme au bord d'une piscine est prête à jouer les pin-up dans votre bureau.Ou votre cuisine. Ou votre chambre. S'exposer, quoi.
Et justement : jusqu'au 14 novembre, ne manquez pas l'exposition Miles Hyman à la galerie Champaka - Paris , au 67 rue Quincampoix - Paris (3ème)


Robert Mc Ginnis, crime & séduction ****
Texte d'Art Scott - Urban comics, 2015 - 176 pages couleurs - 29 €

Miles Hyman, drawings ****
Textes de Michel Rime (avec participation de Fromental, Robial, Matz, Charyn, Guérif, Pouy, Villard et Muri) - Glénat, 2015 - 200 pages couleurs - 39 €

jeudi 22 octobre 2015

Trophées 813 : Le Trophée BD 2015 remis au Mans à Stéphane Oiry pour Maggy Garrisson

C'est chez Bulle, LA librairie BD du Mans, que j'ai eu l'honneur, la joie, l'avantage, et toutes ces sortes de choses, de remettre à Stéphane Oiry son Trophée 813 de la meilleure bande dessinée 2015, obtenu pour "Fais un sourire, Maggy", premier tome de la série MaggyGarrisson, scénarisée par Lewis Trondheim et publiée chez Dupuis.

Samuel Chauveau, maître des lieux, en partance pour Quai des Bulles, a pris le temps de nous recevoir, et même, de faire fabriquer, en deux coups de cuillère à tea-pot, un décor à la mesure de la série : merci Sam, c'est trop ! Si avec ça, Maggy ne dépasse pas le livreur de menhir et son pote dans les best-sellers de l'année c'est à n'y rien comprendre.
En tous cas, bravo encore au duo Trondheim-Oiry, pour cette excellente série, justement récompensée par les adhérents de l'association813. Le troisième tome est sur les rails : qu'ils portent Maggy Garrisson le plus loin possible !

Et merci à Acclo, photographe de choc !

dimanche 11 octobre 2015

[Editions du Long Bec] - Trou de mémoire : Gila monster, par Seiter et Regnauld

Un quai de bois sous la pluie battante. Un homme sort de sa torpeur avec un violent mal de crâne, et le front ensanglanté. Mais que fait-il là ? Cette première question va vite être chassée par d'autres : qui est cette femme, baignant dans son sang, morte, non loin de lui ? Ce revolver qui traine à deux pas, s'en est-il servi ? A-t-il raison de le balancer à la flotte, dans un mouvement de panique ? Et surtout, bon sang, mais qui est-il ? Il ne parvient même pas à se souvenir de son identité... Une chose est sûre : il est à San Francisco, sur le Fisherman's Wharf, face à Alcatraz. Encore sonné et désorienté, l'homme écoute tout de même son instinct qui lui souffle de se tirer au plus vite d'ici. Mais pour aller où ? Dans les poches de son manteau, la carte du Queen Anne Hotel. Autant commencer par se rendre vite là-bas, où il pourra peut-être recoller des morceaux de sa mémoire envolée. Et vite avant que la police ne remonte sa trace : deux inspecteurs, Carnovsky et Mc Gowan sont déjà sur place, près du cadavre de la jeune femme...



Des amnésiques, le polar en a déjà croisé un certain nombre, et ses deux plus célèbres représentants sont certainement le Jason Bourne de Ludlum, et son double, XIII. Roger Seiter n'en a pas moins hésité à en lancer un nouveau dans la famille, et il a parfaitement réussi : son personnage va explorer la moindre piste, pour petit à petit redécouvrir qui il est. Et dans le même temps, l'enquête va progresser, se ramifier, et faire entrer dans la danse le FBI, offrant ainsi l'occasion de lire une nouvelle tranche de la guerre des polices made in USA. Le scénario de Seiter - dont le savoir-faire en la matière nous a déjà donné de belles réussites (comme Fog, avec Bonin) - est parfaitement réglé, et il n'y a plus qu'à se laisser emporter par les superbes planches de Pascal Regnauld. La scène d'ouverture, aux cadrages impeccables, installe immédiatement l'atmosphère et plonge le lecteur au coeur de l'action : ce wharf sous les trombes d'eau, on y est vraiment ! Quant au trait de Regnauld il est ici de la famille d'un Darwyn Cooke ou d'un Antonio Lapone, dont il partage l'élégance et la précision. Pour cette histoire située dans les années 60, le dessinateur a pris le parti de la bichromie, en alternant un bleu-gris pour les scènes nocturnes et un ocre-sépia pour les autres moments de la journée. Avec des tâches rouge là où il faut, bien sûr. C'est un réel plaisir pour les yeux, et c'est aussi l'occasion de découvrir un dessinateur jusqu'à présent surtout connu pour son travail sur Canardo : tout cela achève de faire de cet album une très belle surprise Les éditions du Long Bec ont du reste d'autres histoires noires à leur catalogue, sur lesquels je reviendrai. En attendant, il ne faut pas hésiter à se plonger dans le premier tome de ce diptyque, un vrai et très bon polar. 


 

 


A noter : Trou de mémoire fait partie des 7 albums en course pour le Prix "Polar" 2015 du meilleur "one-shot" ou "diptyque" du 20ème festival du polar de Cognac








Trou de Mémoire : 1 - Gila Monster ****

Scénario Roger Seiter ; dessin et couleur  Pascal Regnauld

Editions du Long Bec, 2015 - 56 pages couleur - 15,50€



jeudi 8 octobre 2015

[Cheers ! ] – Maggy Garrisson (Dupuis), Trophée 813 de la Bande Dessinée 2015


C'était dimanche dernier, à Villeneuve-lez-Avignon, sur le coup de midi trente, sous le soleil, sur la place de la mairie, sous les applaudissements, en plein dans la 11ème édition du Festival de Polar : l'association « 813 » des Amis des littératures policières a décerné ses Trophées. Et pour la meilleure bande dessinée de l'année, les adhérent-e-s ont choisi Stéphane Oiry et Lewis Trondheim pour "Fais un sourire Maggy" , premier tome des aventures d'une nouvelle détective, Maggy Garrisson. 

Le deuxième tome est déjà sorti et je vous avais déjà dit tout le bien que je pensais de cette femme de choc (tenez : c'est par ici). Une récompense méritée qui me réjouit fort, tout comme elle les créateurs de Maggy, qui ont envoyé un petit mot à l'occasion :

Stéphane Oiry : "Je suis très heureux que vous ayez été sensibles aux charmes discrets de Maggy. C'est la première fois qu'un de mes livres est ainsi distingué. C'est  d'autant plus agréable que ce compliment est décerné par des amateurs de polar - le polar ayant toujours été mon genre de prédilection. Je le reçois donc comme un encouragement et une confirmation à persévérer dans cette veine. Merci ! "

Lewis Trondheim : "Ça me fait très plaisir de recevoir ce prix, surtout venant d’un festival de polar, et donc attribué par des spécialistes du genre. En créant ce personnage, je me disais qu’il devait y avoir encore une place pour une enquêtrice anglaise au milieu de toutes celles déjà existantes. Heureusement qu’Agatha Christie n’utilisait pas de gros mots pour ses personnages sinon, on aurait dû faire un western ou un péplum… Un grand merci à vous. "

Messieurs, je n'ai que trois mots à ajouter : "A la vôtre !"



Et si vous aimez le polar, un petit tour sur le blog de 813, et vous découvrirez les lauréats des trois autres catégories : Roman francophone, roman étranger et Prix Maurice Renault.