Ce blog est entièrement consacré au polar en cases. Essentiellement constitué de chroniques d'albums, vous y trouverez, de temps à autre, des brèves sur les festivals et des événements liés au genre ou des interviews d'auteurs.
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Bonne balade dans le noir !

mercredi 30 novembre 2011

[Chronique] - Le Maître de Benson Gate, cycle 2

Boston, avril 1917. Un mystérieux individu interrompt le repas familial de la richissime famille Benson, qui a fait fortune grâce à ses puits de pétrole. L'homme se dit porteur d'un message de Calder, l'aîné de la famille, à destination de son frère Richard, désormais héritier d'un empire financier en pleine ascension. Stupeur autour de la table : Calder est tenu pour mort depuis l'explosion de son bateau, trois ans auparavant, dans le port mexicain de Tampico. Le messager inattendu va alors entamer un long récit en tête à tête avec Richard Benson, et raconter tout ce qu'il sait de l'imprévisible et impétueux Calder Benson, apparemment bien en vie...
Cette série d'aventure a tout de la saga familiale à la Dallas, avec ses coups tordus, ses rebondissements, et cette ivresse du pouvoir qui s'empare de tous ceux qui se veulent se rendre maître du pétrole. Nury, en la plaçant dans les années 1910, lui donne un aspect historique qui renforce encore son attrait. Après avoir établi les rapports de force familiaux des Benson, en pleine ruée vers l'or noir, dans les deux premiers albums, le scénariste revisite dans ce deuxième cycle (« Calder ») les rapports Etats-Unis / Mexique, et fait entrer les rebelles de Pancho Villa dans la danse. A côté de cela, il continue à affiner le caractère de ses personnages, certains se révélant plus sombres que prévus. Et en choisissant de raconter son histoire par la voix de Taylor, le chauffeur garde du corps de Richard Benson, il laisse un peu de répit au lecteur, Taylor gardant une certaine distance par rapport à tout ce qui se passe autour de lui. Mais il y a fort à parier que ce personnage prenne un rôle-clé dans la suite de la saga. Garreta dessine cette série avec un trait réaliste et est aussi à l'aise avec un port en flammes ou une marche harassante dans la jungle qu'avec de paisibles scènes de bonheur familial. Et ses couvertures sont magnifiques...

Le Maître de Benson Gate – Cycle 2 : Calder
Tome 3 – Le Sang Noir
Tome 4 – Quintana Roo

Scénario Fabien Nury , dessin Renaud Garreta
et couleur Jean-François Chagnaud
Dargaud - 54 pages couleur - 13,95 €

dimanche 27 novembre 2011

[Chroniques] - Luna Park et The Mystery Play : l'empreinte Vertigo

Pour celles et ceux qui pensent encore que comics = personnages écervelés en costumes bariolés, voici deux albums parus chez Panini qui viennent rappeler que le polar ne se conjugue pas systématiquement sur le mode du super-héros justicier et de ses états d'âmes. En fait, il faut jusqu'à oublier le mot même, héros, car on a plutôt affaire à des hommes ordinaires quand on se plonge dans ces deux oeuvres riches et déroutantes, estampillées du célébrissime label « Vertigo ».

La première, qui vient de paraître, est Luna Park de Kevin Baker au scénario et de Danijel Zezelj au dessin. Elle retrace l'histoire d'Alik Streinkov, ancien soldat de l'armée russe, qui a cru pouvoir exorciser les démons des guerres auxquelles il a pris part, en s'exilant aux Etats-Unis. Mais il n'échappe pas tout à fait à la violence puisqu'il devient un de ces hommes de l'ombre qui oeuvrent pour la Mafia de Brooklyn. Son quotidien est celui de Coney Island, un univers peuplé de manèges en décrépitude dans un parc d'attraction qui tourne à la ville fantôme... Et bientôt il se retrouvera avec sa maîtresse, la troublante Marina, au coeur d'une guerre des gangs, où il devra aussi affronter son passé... et son futur.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce Luna Park ne se laisse pas dompter facilement, et mérite une lecture attentive : l'entrecroisement des époques (première guerre mondiale, Belle Epoque, guerre en Tchétchénie, Etats-Unis de maintenant) et des personnages (avec la figure multiple de la femme aimée à travers le temps) en font une oeuvre assez complexe. Kevin Baker est un romancier (dont la trilogie à succès Dreamland ne semble pas encore traduite) qui signe là son premier scénario, qu'il a bâti avec une volonté d'imbriquer des récits les uns dans les autres, revisitant en partie l'histoire de la Russie. Et en injectant une petite dose de mysticisme et d'onirisme, il fait définitivement passer Luna Park dans les albums inclassables de cette année. Et si le résultat est si fascinant, c'est bien sûr parce que Zezelj, le dessinateur, passe d'un épisode à l'autre de ce récit dense avec une aisance incroyable et que ses planches, réellement splendides, illustrent à merveille le côté sombre de l'histoire. Album hybride mêlant plusieurs genres avec grâce, Luna Park mérite l'attention de tous ceux jusque là déçus par toutes les tentatives de coucher sur les planches la confrontation d'un homme face à son histoire, et face à l'Histoire.Luna Park
Scénario Kevin Baker et dessin DAnijel Zezelj
Panini Comics, 2011 - 160 pages couleurs - 16 € (Vertigo)

Un autre album paru il y a plus d'un an, au cours de l'été 2010, est tout aussi graphiquement magnifique, et s'inscrit lui aussi dans les comics atypiques. Il s'intitule The Mystery Play, et est d'emblée frappé du sceau "thriller psychologique" en quatrième de couverture. Bon, il est vrai qu'il n'y a guère tromperie sur la marchandise, au regard de l'intrigue écrite par Grant Morrison : Dans la petite ville de Townely, un festival de théâtre est mis en place par la municipalité, histoire de ressouder les gens face à la récession et au chômage, et comme le dit le maire « de permettre à la ville de réaffirmer son identité »... Les pièces choisies sont issues du cycle des mystères médiévaux et ont un aspect biblique prononcé. Et voici que l'acteur jouant Satan assassine celui qui joue Dieu... L'étrange inspecteur Carpenter entre à son tour en scène mais son enquête ne va faire que jeter un trouble encore plus grand...


Tout comme Luna Park – et peut être plus encore – c'est par le dessin que le lecteur de The Mystery Play est happé. Jon J Muth offre des planches littéralement peintes – il est d'ailleurs crédité de peintures et non de dessins au générique – d'un réalisme à couper le souffle. Tantôt proches de la photo, tantôt de l'aquarelle impressionniste, elles créent progressivement un climat d'angoisse et de suspicion, et ne font que rarement retomber la tension. Les notions de Bien et de Mal, de folie et de vengeance, traversent de part en part cet album lui aussi hors norme. Hors norme, car après avoir commencé par la narration traditionnelle d'une quête de la vérité sur un meurtre, il bifurque vers la personnalité de l'enquêteur, avant de se conclure sur l'attitude d'une foule sous tension et de ses pulsions... Un autre véritable ovni dans les « crime comics », à (re)découvrir.

The Mystery Play
Scénario Grant Morrison et peintures Jon J Muth
Panini comics, 2010 - 80 pages couleurs - 12 €

samedi 19 novembre 2011

[Chronique] - Re-Mind 3, ou le film de votre vie...

Ethan Geb a survécu : un attentat à Wall street a été déjoué de justesse grâce à son père, qui s'est sacrifié en utilisant la technologie du re-mind. Celle-ci permet de retracer toute la vie d'une personne dans les instants qui suivent sa mort. Mais si les terroristes ont échoué sur ce coup-là, ils restent un danger : ils ont en leur possession un appareil re-mind, et préparent un nouvelle action. L'inspecteur McKee et l'agent Ethan Geb se mettent en chasse, et essayent de retrouver la trace de la poseuse de bombe de Wall Street...
La première mission – en 2 tomes – était axée sur la découverte de la technologie du Remind, et sur le duo Père-Fils John/Ethan Geb et sur une menace sur le sol des Etats-Unis. (J'avais chroniqué le premier tome : vous pouvez y aller pour le second, les promesses sont tenues !) Cette fois, elle s'internationalise et l'action se déporte jusqu'en Australie. L'intrigue est un peu plus complexe, mais on a toujours l'impression d'être en plein dans une série TV américaine... de qualité. Alcante est un auteur en pleine ascension (dernier coup d'éclat : le tome 4 de XIII mystery avec François Boucq) et l'originalité de son scénario est bien son aspect fantastique, avec cette technologie permettant d'entrer dans la tête des gens. Un peu comme dans Minority Report mais ce ne sont plus les rêves qui sont visités, mais le passé...
Andrea Mutti est quant à lui un nom qu'on croise de plus en plus souvent, et dans tous les genres (un petit tour sur son site perso vous permettra de découvrir l'étendue internationale de sa biblio, déjà bien fournie). Il dessine cette série avec dynamisme, dans un style réaliste qui ne laisse pas de place à la fantaisie, mais on n'est pas là pour rigoler, il faut dire... Les couleurs sont assez réussies, notamment dans les scènes nocturnes. Comme pour la première mission, celle-ci est en deux tomes. Suite et fin au prochain, donc.

Re-Mind, tome 3
Scénario Alcante et dessin Andrea Mutti
Dargaud, 2011 – 48 pages couleur – 11,95 €

jeudi 3 novembre 2011

[Collector] - 100 héros disparus du journal Spirou

421, Ginger, Jess Long, Marc Dacier... Des figures quasi mythiques de détectives, reporters et autres aventuriers qui ont fait les beaux jours de Spirou au fil de l'histoire de l'hebdomadaire. Ces quatre-là, vous voyez certainement qui ils sont, car des albums de leurs aventures ont régulièrement été publiés. Mais tous les héros n'ont pas toujours cette chance de la sortie en 44 planches, suite à leur parution dans le magazine... et sont un peu tombés dans l'oubli. Par exemple, connaissiez-vous le journaliste Brice Bolt (Charlier et Puig), les fans d'aéromodélisme les Casseurs de bois (de Mittéïo, Piroton et Carin), ou le duo de flics Garonne et Guitare (Mythic et Hardy) ?
Accompagnant le Spirou numéro 3839, ce petit supplément revient sur 100 personnages « 100 petites perles qui n'ont pas eu la chance de poursuivre leur chemin ». Présentées en une case, avec un court texte, les dates des premières et dernières apparitions dans la revue, l'ensemble est vraiment plaisant et certaines séries donnent franchement envie d'être (re)découvertes. Evidemment, toutes ne relèvent pas du polar, mais il y en a tout de même pas mal. Je ne résiste pas à l'envie de vous montrer un petit extrait de l'opuscule : ces deux gaillards là n'ont-ils pas l'air intrépides ?Un chouette petit livre, uniquement pour les abonnés, comme d'hab... A vos braderies !

100 héros disparus du journal Spirou -
Supplément (32 pages, format 10 x 15 cm) du Spirou n°3839