C’était déjà samedi dernier, 7 septembre à la BILIPO, Bibiothèque des Littératures Policières, aussi il est temps que je vous annonce la bonne nouvelle : le Trophée de l’association 813 a remis son Trophée de la meilleure BD 2024 ( avec 4 autres Trophées d’autres catégories : voyez plutôt ici le BLOG 813) au duo Jacky Schwartzmann – Sylvain Vallée pour les deux tomes d’HABEMUS BASTARD.
Un prix mérité pour une histoire certes polar, mais un peu dérangée et iconoclaste sur les bords. Le duo s’est montré particulièrement ravi de ce prix décerné par un jury de lecteurs et lectrices, membres de l’association 813 (cette année 170 votants dont 123 pour la catégorie BD, un record). La maisons DARGAUD n’avait pas fait les choses à moitié, puisque pour accompagner les heureux lauréats, deux éditeurs Stéphane Aznar et François Lebescond étaient présents. A noter que l’autre album Dargaud en lice, La Neige était sale de Fromental et Hislaire d’après Simenon, est arrivé en deuxième position des votes, suivi de près par Revoir Comanche de Romain Renard (Le Lombard)
Un Trophée que Sylvain Vallée n’a pas oublié de partager avec la coloriste Elvire de Cock
François Lebescond, Stéphane Aznar, et les deux futurs lauréats , à quelques minutes du verdict
Et pour vous donnez un petit aperçu de ce diptyque inspiré par la grâce polar, je reproduis ici ma chronique parue dans la Tête en Noir en juin dernier :
«Y a un truc qui me paraît évident quand même : c’est que sans la mort, les religions n’existeraient pas. Les mecs ils arrivent avec leur gueule enfarinée et ils te vendent la vie éternelle. Bref, la religion, c’est un business autour de la mort. C’est un peu mon rayon, finalement... »
Il faut pardonner à celui qui prononce ces paroles sacrilèges : le Père Lucien débute dans ce métier de curé, à Saint-Claude (Jura), où il vient de débarquer un peu en catastrophe. Il faut confesser que son vrai métier est plus dans la distribution de pruneaux de plomb que celle d’hosties, et s’il a revêtu la soutane, c’est pour échapper à tout un tas de type bien décidé à lui faire la peau. Alors évidemment, en affirmant que Dieu est noir et en s’interrogeant lors de son proche sur l’idée pas forcément indispensable de tendre la seconde joue, forcément, ses sermons expéditifs laissent les paroissiens un peu sonnés. Mais Lucien va vite reprendre quelques habitudes de truand à l’échelle locale et la petite ville va être secouée de remous peu coutumiers. Jacky Schwartzmann avoue que Saint-Claude se prêtait parfaitement à cette sorte de western urbain qu’il avait imaginé. On retrouve toute la gouaille du romancier – et son ton iconoclaste – dans cette histoire mêlant tueur à gages, mafieux, gitans… plongés au milieu d’une paisible population. Sans oublier ses dialogues, toujours aussi percutants, caustiques et irrévérencieux. Le grand Sylvain Vallée s’est emparé avec un plaisir visible de cet environnement montagnard et ecclesiastique. La neige, l’église, les apparats de la messe et des personnages avec la gueule de l’emploi… tout est parfait et font de Habemus Bastard une des grandes BD de 2024.
Habemus Bastard ****
Scénario Jacky Schwartzmann, dessin Sylvain Vallée et couleurs Elvire de Cock
Dargaud – 2 tomes de 84 pages – 21 €
1– L’Être nécessaire
2 – Un coeur sous une soutane
Merci à Cat Berthier, François Brondel, Boris Lamot et Christiane Trigory pour les photos