Raymond Leigh-Otter est retrouvé chez lui, baignant dans son sang, la tête explosée, et l'arme encore à la main. L'inspecteur LeBrock a vite fait de prouver que ce suicide n'en est pas un, mais qu'il s'agit d'une mise en scène. En fin limier, LeBrock est même capable d'affirmer que les tueurs ont fait le coup vers minuit, qu'ils sont français et qu'il s'agit d'un sanglier, d'un renard et d'un lézard. A son adjoint, Ratzi, qui s'étonne de la certitude de l'inspecteur sur l'origine française des meurtriers, le détective déclare que seuls des assassins d'élite des services secrets de l'Empire de France ont pu faire le coup. Car la victime – un homme aux fonctions diplomatiques - s'apprêtait à rencontrer en urgence le Premier Ministre et le Ministre de la Défense à Downing Street Lebrock y voit là le motif tout trouvé de ce meurtre pas tout à fait anodin.
Restent à connaître les raisons réelles de l' élimination de ce citoyen de la République Socialiste de Grande-Bretagne... LeBrock compte bien les découvrir à Paris, devenue Grandville...
Formidable ! Toujours à la pointe des futurs - ou déjà - grands classiques du genre, Laurent Lerner, avisé boss des éditions Delirium, réédite le chef d'oeuvre de Bryan Talbot : Grandville, dont les éditions Milady avaient publié seulement les deux premiers des cinq tomes de la série, il y a plus de 10 ans... C'est donc reparti pour un tour, avec cette fois l'intégralité de cette série hors-norme.
Restent à connaître les raisons réelles de l' élimination de ce citoyen de la République Socialiste de Grande-Bretagne... LeBrock compte bien les découvrir à Paris, devenue Grandville...
Formidable ! Toujours à la pointe des futurs - ou déjà - grands classiques du genre, Laurent Lerner, avisé boss des éditions Delirium, réédite le chef d'oeuvre de Bryan Talbot : Grandville, dont les éditions Milady avaient publié seulement les deux premiers des cinq tomes de la série, il y a plus de 10 ans... C'est donc reparti pour un tour, avec cette fois l'intégralité de cette série hors-norme.
Et dès cette première enquête, on se dit qu'on a affaire à un album stimulant et intelligent, un vrai régal pour l'oeil et l'esprit ! Vous l'aurez compris à la lecture du petit pitch introductif destiné à vous mettre l'eau à la bouche, cette aventure de « l'Inspecteur LeBrock, de Scotland Yard », est à la croisée de plusieurs genres. Pour tenter une définition, je la qualifierai d'enquête policière uchronique anthropomorphique steampunk. Ne fuyez pas tout de suite ! Je m'explique.
Enquête policière : Bryan Talbot nous invite à suivre son détective – et son assistant - dans sa recherche de la vérité, et il le fait en respectant les codes du genre, en commençant par les plus classiques, tels que l'observation de la scène du crime permettant d'étonnantes déductions. Il poursuit par l'interrogation de témoins, suspects et autres victimes de l'affaire. Du solide pour la progression de la narration.
Uchronique : c'est là que les affaires prennent une autre ampleur... Le cadre de « Grandville » est celui d'une Europe où Napoléon a vaincu les anglais et où la famille royale a été guillotinée. Et où l'Angleterre est devenu un pays insignifiant relié à l'Empire de France par un pont. Ce postulat ouvre sur des portes imaginaires jubilatoires, où ce que nous savons de l'Angleterre et la France de maintenant est secoué dans un mixer historico-politique réjouissant.
Anthropomorphique : pour pimenter le tout, Talbot opte pour une représentation animale de tous les protagonistes de son histoire, avec, à l'instar du Blacksad de Guarnido et Canales, ou du Canardo de Sokal, une réelle adéquation entre les animaux choisis et leurs personnalités. Mais alors que Blacksad est fascinant essentiellement par son aspect graphique, « Grandville » l'est lui par l'univers qu'il donne à explorer, un univers que Talbot lui-même avoue avoir pris un grand plaisir à créer. Il l'explique dans une longue postface, réalisée pour cette version française, où il dévoile aussi les clins d'oeil et références qu'il a distillés tout au long de cet album. Le lecteur de BD averti en aura lui-même déniché quelques-uns, mais impossible de tout repérer, en particulier tout ce qui est issu de la culture populaire britannique. Hommage direct au caricaturiste français JJ Grandville, et à Albert Robida, illustrateur français de science-fiction, cette aventure de LeBrock appartient aussi sans conteste à la famille steampunk, branche de la SF née dans les années 80. Bryan Talbot a du reste inventé des motifs « steampunk-art nouveau » pour ce comics... Talbot est un créateur absolument unique, à l'aise dans tous les genres, et une visite sur son site s'impose à vous si vous ne connaissez pas cet artiste.
Pour cette réédition la traduction de Philippe Touboul a été revue et corrigée, et la postface pré-citée conservée, avec une mise en page légèrement différente pour l'iconographie. Enfin, cette version Delirium est complétée par 5 pages de commentaires par Talbot lui-même, planche après planche, sur son travail sur cet album. Un vrai trésor !
Ah et pour finir, Grandville est sous-titré "une romance scientifique de l'inspecteur LeBrock de Scotland Yard". Si avec ça vous n'avez toujours pas envie de foncer à Grandville...
Grandville ****
Texte et dessins Bryan Talbot
Delirium, 2023. - 136 pages couleur - 22 €
Sortie le 5 février 2023
viens de terminer la visite de Grandville
RépondreSupprimerAussi enthousiaste que le chroniqueur, un univers, de l'humour (parfois gogolito à souhait), et en plus c'est beau
Je vais de ce pas visiter le site de l'auteur
Ton commentaire de 2010 reste plus que jamais d'actualité, camarade Phil Perfect !
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