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lundi 29 juin 2015

[Sweet home Alabama] – Southern bastards, par Aaron et Latour (Urban comics)

Earl Tubb est de retour à Craw County, une ville qu'il a fuie il y a plus de 40 ans. Pas pour longtemps se dit-il : s'il revient dans ce coin de l'Alabama, c'est uniquement pour vider la maison de son oncle Buhl. Et pas pour autre chose  : pas question pour Earl d'arpenter les rues, en souvenir du bon vieux temps, celui où son père était shérif de Craw County. Non. Car il tomberait forcément sur Euless Boss, entraîneur de l'équipe de foot du cru, et forcément, cela laisserait quelques traces, car entre ces deux hommes, cela n'a jamais été le grand amour. Même si à l'époque, Boss n'était pas encore le coach à poigne de fer qu'il est devenu, craint par toute la communauté et régnant en maître absolu de la cité... Mais il ne suffit pas à Earl Tubb de vouloir juste détourner son regard de choses qui heurtent ses convictions et son sens de la justice : témoin d'une scène insupportable à ses yeux dans le snack de la ville , il laisse parler son cœur, et ses poings. Et c'est bien entendu le début de très gros ennuis pour lui...

Les deux Jason, Aaron (scénariste, celui aussi de « Scalped ») et Latour (dessinateur) l'expliquent dans leur préface : ils ont voulu rendre hommage à leur manière à ce Sud des Etats-Unis qui les a vu naître, cet « endroit que tu peux à la fois aimer et haïr, qui te manque mais que tu crains » (Aaron) et où on peut croiser ces « connards dont on a fait une généralité de tous les gens du Sud. Ceux qu'on a peut-être peur d'être au fond » (Latour). Alors, ils y vont franco : bienvenue dans une ville sous l'emprise d'un fou furieux, psychopathe cynique que personne n'ose contredire. Sauf une personne, bien sûr, mais on n'est pas là pour rigoler, et les redresseurs de torts, dans la région, ils ne font pas longtemps de la résistance. Après un premier volume qui plante parfaitement le décor, et installe une atmosphère irrespirable jusqu'au bout, le second tome s'attarde sur la jeunesse du coach Euless Boss, passée à cracher sang et tripes sur le terrain de football, sans autre résultat que des coups de batte, de poings, de pieds... ou de revolver. Une jeunesse atroce, qui façonnera le monstre qui s'emparera du pouvoir à Craw County. 
On prend « Southern Bastards » comme un plaquage en pleine poitrine : cela coupe le souffle net, et quand on se relève, le deuxième service n'est pas très loin. Et on se demande bien qui osera s'élever contre ces salauds à l'état brut. La couleur rouge domine dans les pages de ces deux premiers volumes, y compris pour les nombreux flashbacks, qui sont le plus souvent des souvenirs au goût de sang... Bref, vous l'aurez compris : voici un des comics les plus âpres, les plus rugueux, les plus poisseux, les plus cruels, du moment.  Il manque juste un peu de femmes, dans l'affaire. Mais patience : la fille d'Earl Tubb est sur la route... 


Southern bastards ****
Scénario Jason Aaron et dessins Jason Latour – Urban Comics, 2015 – Collection Indies – 14 €
1 – Ici repose un homme – 112 pages couleur
2 – Sang et sueur – 112 pages couleur