Ce blog est entièrement consacré au polar en cases. Essentiellement constitué de chroniques d'albums, vous y trouverez, de temps à autre, des brèves sur les festivals et des événements liés au genre ou des interviews d'auteurs.
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Bonne balade dans le noir !

lundi 14 octobre 2024

[Vive les blaireaux!] - Grandville – Force Majeure, de Bryan Talbot (Delirium)

 

Un restaurant de fruits de mer, chic et art déco. Les convives dînent dans une ambiance feutrée, calme et reposée. Soudain c’est le chaos : les grandes baies vitrées explosent en milliers de fragments de verre, les clients sont criblés de balles tirées en rafales. Cela ne dure que quelques secondes et à la fin, les poissons encore vivants restent tétanisés. Pas les poissons des assiettes : les poissons en costumes trois-pièces car nous voici au début du cinquième et dernier tome de Grandville, la série polar phare de Bryan Talbot où les personnages sont tous des animaux anthromorphes. Et quelle série ! Pour mémoire, nous voici à une époque où, 200 ans après la victoire de Napoléon sur l’Angleterre, Paris s’appelle désormais Grandville, et est le coeur du plus grand empire du monde. Mais au moment où s’ouvre Force Majeure, l’Angleterre a retrouvé son indépendance, et la France est gouvernée par un Conseil Révolutionnaire. C’est dans ce contexte que l’inspecteur LeBrock, un blaireau vigoureux et fin limier, va enquêter sur ce massacre du restaurant, en compagnie de son fidèle adjoint Roderick Ratzi, certes plus chétif – il ne faut pas trop en demander à un rat – mais tout aussi efficace dans les affaires qu’il démêle avec son chef. Et celle-ci va vite les conduire à la piste de Tiberius Koenig, lézard rouge tendance tyrannosaure, et qui est à la tête avec ses frères du gang le plus meurtrier et sanguinaire de la ville. Et en passe de réunifier toutes les bandes de malfrats, malfaiteurs et malfaisants de la cité. Mais LeBrock va aussi vite se rendre compte que c’est lui-même la cible, ainsi que tous ses proches, une vieille histoire de vengeance à assouvir pour Koenig…



C’est un bonheur absolu de retrouver l’univers steampunk et spectaculaire de Bryan Talbot, dans une intrigue digne des quatre précédentes (il faut lire tout Grandvlle !), et qui cette fois donne à découvrir le passé de l’indestructible blaireau, et ses débuts dans la police sous la houlette de son mentor, l’inspecteur en chef Stamford Hakwsmoor. Et en parallèle à la narration d’une enquête ancienne et exemplaire, Talbot nous mène par le bout du museau dans l’affaire la plus dangereuse que LeBrock ait eu à résoudre, avec un de ses adversaires les plus coriaces et impitoyables.

 Une construction narrative sans faille au rythme graphique infernal. Avec toujours ces sens du cadrage et de l’action : la scène d’introduction est à couper le souffle, tout comme un peu plus loin une poursuite dans les rues mal famées de Grandville, entre Billie, la fiancée de LeBrock et les sbires de Koenig. 

Ajoutez à cela une bonne dose d’humour dans les dialogues aux réparties percutantes (les piques du héros à son supérieur hiérarchique, abruti notoire, sont savoureuses), et vous avez bien entre les mains un must du comics anglais !

 Sans oublier ce qui fait également tout le charme de la série depuis le début : ces clins d’oeil et références à l’art, la culture, le cinéma dont Talbot parsème avec délectation ses aventures. C’est un jeu de s’amuser à les retrouver ! Parfois c’est facile : tel cette visite au musée de cire où LeBrock admire un peu amusé les statues de Blacksad et Canardo, dans la partie « Célèbres détectives ». 

Et pourquoi tu n’y es pas toi ? demande Billie. Question juste : LeBrock a toute sa place sur le podium. Il est même sur la plus haute marche !

  Et si vous ne trouvez pas, plongez-vous dans les commentaires de Bryan Talbot himself, à la fin de l'album, c'est passionnant !

 

 

Encore merci à Delirium d’avoir repris cette superbe série, et traduit les trois tomes restés inédits. 

Avec « Noël », quatrième paru en début d’année, 2024 est vraiment l’année Grandville !

 

 

Une sortie fêtée comme il se doit par une tournée, débutée ici à la librairie Planète Dessin le 7 septembre dernier, par Laurent Lerner, boss de Delirium, et Bryan Talbot (avec sa femme Mary sur la photo),… et deux nouveaux fans – 600ème acheteurs ! 

 

Granville – Force Majeure *****

Textes, dessins et couleurs Bryan Talbot – Trad. Philippe Touboul

Delirium – 162 pages couleurs – Sortie le 6 septembre 2024

lundi 7 octobre 2024

[PRIX] - Le Trophée 813 de la Bande Dessinée 2024 à Dabitch et Macola pour « Le Passeur de lagunes » (Futuropolis)

 Un mois déjà que la cérémonie de remise des Trophées de l’Association 813 a eu lieu à la BILIPO à Paris ! Et alors que j’étais sur place, je ne vous ai pas encore parlé ici. C’est pas bien ! Alors avec un léger différé c’est avec joie que je vous annonce que Le Trophée 2024 de la Bande dessinée a été décerné au duo Christophe Dabitch (scénario) et Piero Macola (dessin) (notre photo exclusive :-) ) pour Le Passeur de lagunes (Futuropolis).

 


 J’avais chroniqué cet album à sa sortie : cliquez-donc ici si vous voulez en savoir plus sur ce superbe album.

Mais les Trophées 813 sont aussi décernés pour d’autres catégories

- Le roman francophone : Marin Ledun pour son roman "Free Queens" (Série Noire)

le Trophée Michèle Witta récompense un roman étranger : Denis Lehane pour "Le Silence" (Gallmeister), traduction de François Happe

- Le Prix Maurice Renault pour au livre Derrière les lignes ennemies, recueil d’entretiens donnés par Jean-Patrick Manchette de 1973 à 1993, et édité à la Table Ronde par Nicolas Le Flahec

- Enfin le Trophée de la nouvelle a été attribué au collectif « Stop ! » aux éditions La Manufacture de livres

 

Un petit tour ici sur le blog de 813 vous remettra dans l’ambiance de ce samedi 7 septembre, en images et en photos (merci Boris Lamot!)



dimanche 4 août 2024

[Naissance des True crimes stories] – Truman Capote : retour à Garden City, par Nadar et Xavier Betaucourt (Futuropolis)

 

Dès qu’il s’agit d’aborder la littérature en bande dessinée on peut compter sur Futuropolis. Mais je ne vais pas ici vous chroniquer une des nombreuses adaptations du mois (il y en a pas mal et des pas trop mal), et encore moins vous exposer mon avis tranché sur le roman graphique (c’est de la BD, question suivante) mais bien vous vanter les qualités de ce Truman Capote de Xavier Bétaucourt et Nadar, paru il y a quelques mois.


Sous-titré « Retour à Garden City », cet album dense mais à la lecture hyper fluide narre le retour de Truman à Holcomb, en mars 1967, sur le tournage du film « De sang froid », adaptation par Richard Brooks du roman majeur de Capote, paru un an plus tôt. Roman  ou plutôt récit majeur et précurseur d’un genre appelé à rencontrer un succès durable : le true crime. Le titre complet du livre est  en effet : « De sang froid : récit véridique d’un meurtre multiple et de ses conséquences ».


Et ce qui est donné à lire dans cet album de Bétaucourt et Nadar, ce sont d’autres conséquences : celles de l’écriture de cette œuvre sur son auteur. Car ce retour sur les lieux du crime – le massacre d’une famille de fermiers par deux hommes, Perry Smith et Richard Hickock - se passe en 1967, huit ans après les faits, presqu’autant d’années qu’a mis Capote a aller au bout d’un projet qui l’a littéralement consumé. Et c’est toute cette longue gestation qui est mise en images, par aller-retours entre trois périodes / moments-clés : un, le meurtre des Clutter, l’arrestation, l’interrogatoire et l’execution de Smith et Hickock, deux le travail sur le terrain auprès de la population par Capote et son amie Harper Lee pour le New Yorker – et le début de la relation particulière du romancier avec Perry Smith – et enfin, trois, ce retour à Holcomb sur le tournage du film. Trois périodes habilement distillées et imbriquées les unes dans les autres par les auteurs, et qui permettent peu à peu de cerner la personnalité de Truman Capote et de définir les contours de cette attraction / répulsion qu’il a eu pour ce faits divers et cette Amérique profonde. Un Kansas aux mœurs qui devaient lui paraître bien lointains, à lui le dandy New-Yorkais habitué de la jet-set littéraire et des feux de la notoriété. Si loin, mais peut-être si proche également, au regard de la proximité de plus en plus grande que Capote semble éprouver envers Smith, son presque double maléfique… Qu’est-ce qui fait qu’on bascule du mauvais côté ? Un passage clé de l’album aborde la question. Alors que Capote vient rendre visite au meurtrier – alors que c’est interdit, mais le journaliste-romancier avait quelques arrangements avec le chef de la police locale – et que Smith est en train de – bien – dessiner le dialogue s’installe :


- C’est beau 

- Je te l’ai déjà dit, j’aurais été artiste si la société ne m’avait pas amené ici

- Comment ça ?

- Tout ça c’est la faute à ce que j’ai vécu dans mon enfance…


Une conversation qui ramène instantanément Capote à son enfance à lui, « une des pires enfances au monde », ce qui ne l’a pas empêché de rester « à peu près correct et respectueux des lois ».

Se dresse ainsi au fil des pages une description psychologique d’un auteur certain d’écrire un ouvrage majeur mais de ne pas toujours être sûr de comment finir… tant que les meurtriers sont encore de ce monde. A noter que le côté imbu de lui-même et méprisant de Capote est bien présent et que graphiquement il est très réussi comme tous les autres personnages d’ailleurs. Nadar fait passer aussi pas mal d’émotions par son trait, et c’est une autre des forces de cette BD.

Une autre et non des moindres est de donner l’envie de se replonger dans les autres romans et nouvelles de Capote, qui n’écrira plus rien de marquant après De sang froid.

Et l’envie aussi d’aller voir du côté du plus célèbre roman de son amie Harper Lee, « Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur » (To kill a Mocking bird), paru lui en 1960, et figurant dans les 100 meilleurs livres policiers de tous les temps, liste établie par les Mysterious Writers of America en 1995.


Enfin, à noter qu’une autre BD avait pour cadre Capote in Kansas, comics de Ande Parks et Chris Samnee (édition française chez Akileos en 2006), qui suivait les pas de l’auteur au même endroit mais plus longuement au moment de l’écriture de son livre, peu de temps après le massacre de Holcomb. A lire également . Avec In cold blood, of course…


Truman Capote : retour à Garden City ****

Récit Xavier Betaucourt et dessins Nadar - Futuropolis, 2024 – 112 pages couleurs – 21 €

Parution 1er mai 2024


lundi 22 juillet 2024

[Adaptation] – Mysteras et la Cour d’épouvante : Le retour d’Harry Dickson chez Dupuis, par Headline, Vergari et Catacchio

 

Faut-il encore présenter le célèbre détective de l’étrange, Harry Dickson, alias le Sherlock Holmes américain ? Peut-être oui, car s’il a acquis au fil des décennies un statut de personnage classique de la littérature policière, le héros créée par Jean Ray, créée dans les années 20, reste certainement encore dans l’ombre des mastodontes Holmes (donc) et Lupin. Cette nouvelle reprise en cases marque une volonté – dixit les éditions Dupuis - de « lui redonner tout son prestige et ses lettres lettres de noblesses en offrant à ses exploits une adaptation graphique et narrative impeccable et pertinente ». 

 

D’abord – et donc – pour qui ne connaît pas encore Harry Dickson, sachez que c’est un détective suprêmement intelligent, et que ses enquêtes le mènent systématiquement aux frontières du fantastique : une banale affaire a vite fait de basculer dans le monde des fantômes, vampires, savants fous et autres ennemis baignant sans vergogne dans le surnaturel. Assisté du jeune et fidèle Tom Wills, sur qui Dickson compte surtout quand il s’agit de donner du coup de poing ou de revolver, tous deux résolvent des affaires aux rebondissements multiples et spectaculaires, dans des ambiances délicieusement flippantes. Voilà le tableau côté romans, ou plutôt novellas, car les histoires de Jean Ray sont plutôt de longues nouvelles, d’environ 70-80 pages.

Et pour inaugurer ce nouveau cycle d’adaptations, le trio Doug Headline- Luana Vergari (scénario) et Onofrio Catacchio (dessin) a choisi de se replonger dans l’imposant corpus de ces trépidantes aventures existantes (plus de cent) et a porté son choix sur ?? Mystéras ?? et la Cour d’épouvante pour ses deux premiers tomes. Choix judicieux car il permet d’entrain de plain-pied dans l’univers dicksonnien : un condamné électrocuté sur la chaise électrique réussit son évasion, pendant qu’une romancière prisonnière de sa propre tour ultra-moderne est enlevée - alors que c’est impossible - (Mysteras) et un homme – millionnaire - en proie à un cauchemar récurrent (il passe en jugement devant un terrifiant tribunal qui finit par le condamner à mort) en appelle à Dickson pour le sortir de ces songes de plus en plus réels (La Cour d’épouvante). Rien que ça !

Et dans les deux cas – les albums constituent une sorte de diptyque même s’ils peuvent se lire de manière indépendante – un génie du mal et de la manipulation est à l’oeuvre, un ennemi qui tient autant de Moriarty que de Fantômas…


Disons-le franchement : c’est avec un grand plaisir que le fan de Dickson (dont je suis) retrouve l’atmosphère si particulière qui règne dans les histoires de Jean Ray. Tout y est, des landes embrumées aux manoirs austères et menaçants, en passant par les déguisements audacieux, les créatures nocturnes inquiétantes, les courses-poursuites échevelées et les coups-fourrés de dernière minute. Un vrai feu d’artifice, réussi grâce au trait « ligne claire » adopté par Catacchio, et qui convient tout à fait à aux scénarios du duo Headline-Vergari. Il y a certes aussi un côté vintage dans ces planches, mais qui colle finalement bien à l'époque des intrigues de Jean Ray.

D’autres auteurs s’étaient déjà emparés de Harry Dickson, notamment par Vanderhaege, Zanon et Renaud (13 albums entre 1986 et 2018) ou par Nolane et Roman (13 histoires, cette fois, originales de 1992 à 2009) mais c’est certainement ce retour chez Dupuis, qui prévoit 1 tome par an, qui est le plus proche de l’esprit de la série. Si vous ne connaissiez pas encore le « Sherlock Holmes américain », c’est le moment ou jamais de le rencontrer. Lui et ses « ennemis vomis par l’enfer » (tels qu’ils sont qualifiés dans l’excellente postface du tome 2) dont le prochain sera « Le Vampire aux yeux rouges »… 


Harry Dickson *** , d’après Jean Ray

Scénario Doug Headline et Luana Vergari – Dessin Onofrio Catacchio – Dupuis, 64 pages couleur

1 – Mysteras (5 mai 2023)

2 – La cour d’épouvante (17 mai 2024)

lundi 17 juin 2024

[un scénariste à suivre] - Un hiver à l'opéra ? Quelque chose de froid ! Deux albums de Philippe Pelaez chez Bamboo et Glénat

 Bon, d'accord, je plaide coupable pour le titre en forme de jeux de mots laid mais n'emp^che : depuis une petite dizaine d’années, son nom revient régulièrement sur nombre de couvertures d’albums, dont une bonne poignée de polars : Philippe Pelaez fait désormais partie de ces orfèvres du scénario dont la moindre nouveauté mérite qu’on s’y arrête. Retour sur deux sorties récentes : Hiver à l’opéra (Bamboo – Grand Angle) avec Alexis Chabert  et Quelque chose de froid (Glénat) avec Hugues Labiano. 

 

Deuxième opus d’un cycle qui embrassera les quatre saisons, Hiver à l’opéra reprend là où Automne en Baie de Somme s’était arrêté : à la fin du XIXème, l’inspecteur Broyan, après une affaire politico-industrielle où il a fait tomber quelques têtes dont certaines haut placées, se retrouve près du licenciement. Et le voici, en cette année 1897, à l’Opéra Garnier, où débute une nouvelle affaire qui va émouvoir les foules, qui plus est en direct : un colonel chargé de la sécurité du Président de la République en personne est spectaculairement jeté en pâture au spectateurs, là pour La Damnation de Faust. C’est une autre damnation, et d’autres ombres de son passé auxquelles va être confronté Broyan, qui se lance dans l’enquête malgré sa radiation : qui peut bien être cette mystérieuse tueuse capée de rouge et masquée de blanc qu’il était à deux doigts d’arrêter ? Le scénario de Pelaez à la lisière du fantastique – hommage direct et assumé à Gaston Leroux – est une nouvelle fois magnifiquement mis en image par Alexis Chabert, qui restitue à merveille un Paris en plein Art Nouveau. Ses couleurs directes, au pastel ou à l’aquarelle, et ses décors fascinants (mention spéciale aux sous-sol labyrinthiques de l’Oéra-Garnier!) participent complètement à l’immersion totale dans l’univers créé par son scénariste. Il reste deux saisons à découvrir, alors vivement le Printemps !

 

Quelque chose de froid est l’album inaugural d’une trilogie baptisée Trois touches de Noir. Et l’entrée en matière donne tout à fait le ton… Nous sommes cette fois en 1936 dans l’Ohio, à Cleveland pour être précis où un dénommé Hedgeway, malfrat de son état, est de retour, mais… pour quoi faire ? C’est ce que se demande la police locale, qui décide de le tenir à l’oeil, en attendant de réussir à le faire parler sur des affaires passées : Hedgeway était visiblement bien vu par le parrain local avant de le trahir en emportant bijoux et livres de comptes… Et c’est dans un hôtel où les pensionnaires auraient pu figurer au générique du Freaks de Tod Browning qu’atterrit l’homme de main. Ce camp de base et ses inquiétants locataires est parfait pour la vengeance ourdie par Hedgeway : il lui reste à attendre la suite des événements, qui ne tarderont pas à se précipiter… 

 

C’est cette fois avec Hugues Labiano que Philippe Pelaez s’est associé pour ce qui est un véritable hommage au film noir des années 40-50. Et c’est graphiquement aussi réussi que dans le cycle évoqué plus haut… mais avec une ambiance nettement plus sombre ! Composé en bichromie où dominent le bleu-gris,et où les scènes nocturnes sont éclairées à la lune ou au néon, c’est une plongée au coeur d’une Amérique profonde et poisseuse que nous convient les auteurs. Et qui n’hésitent pas à convoquer la figure mythique d’Elliot Ness le temps de quelques scènes, et surtout de situer leur histoire au moment où la ville est en proie à la psychose du « tueur aux torses » (oui le « Torso » du comics de Brian Michael Bendis). Au-delà de cet aspect historique, c’est aussi tout le côté psychologique qui fait mouche dans le récit de Pelaez : son « héros » ne s’approche-t-il pas dangereusement du côté sombre de l’âme humaine au fur et à mesure que sa vengeance s’accomplit ? Une des nombreuses questions posées par cet album splendide, agrémenté d’un passionnant dossier sur le film noir en fin d’album, par Pelaez lui-même.

Là encore, on attendant la deuxième des Trois touches de Noir avec une impatience  certaine ! 

Et pour connaître en savoir un peu plus sur ce scénariste, rendez-vous cet été dans les pages du prochain numéro de la revue 813 (le n°149) pour un entretien avec Philippe Pelaez...

Ou tout de suite sur son site : De Bruit et de fureur.

(PS : pour cellezetceusses qui croient déjà avoir déjà lu cet article, c'est normal : il est passé dans le numéro 228 de la Tête en Noir. Je suis un bloggueur éco-responsable : je recycle)

 

Hiver à l’opéra ****

Scénario Philippe Pelaez et dessin et couleurs Alexis Chabert - Bamboo (Grand Angle)

72 pages couleurs -16,90 € - Parution octobre 2023

 

Trois touches de Noir - Quelque chose de froid ****

Scénario Philippe Pelaez,dessin Hugues Labiano, couleurs Jérôme Maffre – Glénat

64 pages bichromie -15,50 € - Parution 6 mars 2024

dimanche 26 mai 2024

[Western crépusculaire] –Pastorius Grant, par Marion Mousse (Dargaud)


 Voilà longtemps que je ne vous avais pas causé Western dans ces pages alors c’est le moment vous présenter le cow-boy solitaire créé par Marion Mousse : Pastorius Grant, chasseur de primes en bout de course, qui recrache plus vite ses poumons qu’il ne dégaine son colt 45 Buntline Special.

Mais ce cow-boy n’est pas si solitaire que ça, et gravitent autour de lui ceux et surtout celle qui vont être au centre de cette histoire crépusculaire. Par ordre d’apparition voici donc Porti et Tavez, le gros et le maigre, traqueurs mexicains de la même proie que Grant. Ils n’ont pas l’air bien finauds, mais semblent pugnaces, même si Tavez ne sent pas trop le coin où ils viennent d’arriver : n’y a t-il pas encore des Comanches dans cette réserve soit-disant désertée par les Indiens ? Faut voir…

Big Hand est lui le prisonnier de Grant, qui le ramène en ville, à Christfield, pour toucher les 5000 dollars de prime. Entravé, le hors-la-loi doute fortement de la capacité du chasseur de primes souffreteux d’arriver à bon port et n’a qu’une crainte finir aux mains des sauvages.

Et enfin, arrive sans crier gare au beau milieu de ce quatuor, Annabelle Hope, petite fille d’une douzaine d’années. Elle veut embaucher Pastorius pour qu’il retrouve celui qui a tué son père, qui lui a dit « S’il m’arrive malheur, va voir Pastorius Grant ». La mort étant une forme de malheur, Annabelle a donc suivi le conseil paternel. Mais pas facile de trouver son chemin dans la forêt sauvage quand on est aveugle : heureusement, la gamine voyage avec son cochon, qui la guide grâce à son flair redoutable…

Tout ce petit monde chemine à travers une nature rude et grandiose, et va finir par se retrouver. Les comptes vont pouvoir être réglés, mais qui au final l’emportera au Paradis ?

Ce western est une merveille ! Déjà, dès les premières pages, on ne peut être qu’emporté par ces décors et ces scènes réalisés en couleurs directes : la palette choisie par Marion Mousse fait de Pastorius Grant un album invitant à un voyage autant onirique que philosophique… Rien que ça, oui ! Cette forêt nocturne nimbée de rose, mauve et bleu, et ces collines luxuriantes, ces pistes rocailleuses encaissées dans des canyons orangés, cet énorme rocher suspendu présent dès la couverture ; tout concourt à faire de cette traque une véritable réflexion sur le sens de la vie, et c’est à un vrai examen de conscience que va se livrer Pastorius Grant, dès que la jeune Annabelle va faire irruption dans sa vie. Ou plutôt dans ce qu’il lui reste de vie.

 

Bon évidemment, tout cela on le découvre au fur et à mesure de ce qui demeure un récit à suspense – oui, tout de même – au rythme parfait, avec ce qu’il faut d’ingrédients pour qu’on ne décroche à aucun moment. Et il faut le répéter : chaque page est un régal, tout fait sens, et sensation même. On peut même y voir un hommage à Lucky Luke : ce Grant solitaire n’a-t-il pas la même tenue que le célèbre homme qui tire plus vite que son ombre ? Ici, la silhouette courbée sur son fidèle cheval Général s’apprête à rejoindre les ombres. Partira-t-il en paix ? A vous de juger… Cet album est certainement un des meilleurs de Marion Mousse (auteur rappelez vous de GhoSt 111, fauve Polar SCNF 2021), auteur également récemment d’un Bela Lugosi du meilleur goût (scénario de Philippe Thirault, dans la collection 9 ½ consacrée au cinéma chez Glénat).

Enfin, si vous êtes à Paris le jeudi 13 juin, passez donc à la Librairie Super Héros, Marions Mousse y dédicacera cet album


Pastorius Grant ****

Textes et dessin Marion Mousse – Dargaud, 2024 – 116 pages couleur – 21 €

Parution 24 mai 2024


mercredi 1 mai 2024

[Adaptation] – Vénus privée : la première enquête de Duca Lamberti / Paolo Bacilieri d’après Giorgio Scerbanenco (Ici Même)

 

Regardez bien cette couverture. Au premier coup d’oeil, de loin, voici une belle femme, sensuelle, accablée par la chaleur, des perles de sueur dégoulinant sur son corps. Maintenant, penchez l’album de 90° sur la gauche, mettez le sur le dos et approchez vous  : ce ne sont pas des gouttes mais des fourmis. Voici un beau cadavre, n’est-ce pas ?

Les pages suivantes le confirment : voici la dépouille d’Alberta, découverte dans un terrain vague dans la périphérie milanaise. Un suicide, comme le conclut vite l’enquête, au regard des poignets profondément tailladés de la victime. C’est à peu près à cette même période que Duca Lamberti sort de prison : ce médecin désormais radié de la profession a passé trois ans derrière les barreaux pour avoir pratiqué l’euthanasie sur une vieille femme cancéreuse en phase terminale. Et pour son retour à l’air libre, Lamberti se voit confier par le fortuné industriel Auseri une tâche un peu particulière, celle de faire cesser l’alcoolisme de son fils Davide.

Apparemment étrangers l’un à l’autre, ces deux événements vont tout de même étrangement se percuter lorsque, en visite au cimetière de la ville, Davide demande à voir une tombe particulière en soufflant à Lamberti : « Elle s’appelle Alberta Radelli… c’est la femme que j’ai tuée l’an dernier ». Et Davide raconte alors sa rencontre avec Alberta…

Et je m’arrêterai là pour cette mise en bouche, pas question d’en dévoiler plus sur cette première enquête de Duca Lamberti, le médecin radié, et un brin tourmenté, créée par Giorgio Scerbanenco dans les années 60. Les quatre romans de la série plongeaient les lecteurs dans un Milan des plus sombres, qui ont valu - avec ses autres livres – à l’auteur le statut de maître du roman Noir italien ( il existe du reste depuis 1993 un Prix Scerbanenco récompensant le meilleur polar italien de l’année). L’adaptation de Paolo Bacilieri (à qui on doit aussi Adios Muchachos, d’après le roman de Daniel Chavarria, pour feue la collection Rivages/Casterman/noir) restitue bien l’atmosphère du roman, et on suit les pas de Lamberti dans un Milan garanti d’époque. Ses scènes de rues fourmillent de détails, et ses bâtiments dessinés sous toutes leurs coutures : il n’y a pas à dire, on est à Milan en 1966. 

 

 Mais ce qui frappe surtout, c’est cet art de la planche, où cases, angles et points de vues, ombres et lumières, plans subtilement variés, forment un tout qui fonctionne à merveille. Et côté personnage le trait du dessinateur est ici parfois proche de celui de Pichard ou de Crépax. On peut se demander aussi si Paolo Bacilieri n’a pas vu l’adaptation cinéma d’Yves Boisset (1970 sous le titre Cran d’arrêt), car son Lamberti a un petit quelque chose, de manière fugace, de Bruno Cremer qui jouait le rôle du médecin dans ce film. Film par ailleurs aux dialogues d’Antoine Blondin et à la musique de Michel Magne : à (re)découvrir assurément !

  Quant au roman matrice, il est initialement paru en 1966 en Italie, puis fut publié en France d’abord dans la collection Grands Détectives, avant d’être repris au catalogue Rivages/Noir. Venus privée a désormais trouvé refuge chez Gallmeister, dans leur élégante collection Totem, avec une nouvelle traduction de l‘italien par Laura Brignon. Le deuxième volume Tous des traîtres a également été réédité, et les deux autres de la série le seront certainement. 

 

Mais en attendant, il faut vous plonger dans cette Vénus privée-là, dans ces 160 pages dessinées avec brio. Et espérer que les trois autres romans de la série seront aussi adaptés et publiés par Ici Même, qui avait déjà à son catalogue les étonnants Fun et More Fun du même Bacilieri.


Vénus privée : la première enquête de Duca Lamberti ****

Textes et dessin Paolo Bacilieri d’après Giorgio Scerbanenco ; traduit de l’italien par Laurent Lombard – Ici Même, 2024 – 160 pages noir et blanc – 22 €

Parution 3 mai 2024


dimanche 24 mars 2024

[Adaptation] – Siniac is back ! Carton blême de Boris Beuzelin et JH Oppel réédité chez Komics Initiative

 

Le superbement pessimiste polar fantastique – et visionnaire ? - de Pierre Siniac paru initialement dans la collection Engrenage en 1985, puis réédité par Jean-Jacques Reboux chez Canaille, et enfin en Rivages/Noir en 2003 avait aussi connu une première adaptation BD, par Jean-Hugues Oppel et Boris Beuzelin. Une version parue dans feue la collection Rivages/Casterman/Noir, et que Mickaël Géreaume et sa maison Komics Initiative reprennent, via une traditionnelle campagne de financement Ulule qui a démarré sur les chapeaux de roue

Interview express de Boris Beuzelin avec comme première question : pourquoi diable ce retour du Carton Blême ?

Boris Beuzelin : C’est moi qui ai proposé à Mickaël ce projet de réédition. J’avais cette idée en tête depuis longtemps et j’attendais un moment favorable pour la concrétiser au mieux. la raison en est que je n’étais pas satisfait de la première version qui ne correspondait pas à l’idée que Jean-Hugues et moi avions de l’album. À cela deux raisons, d’une part l’album est sorti en couleur alors que nous voulions une version noir et blanc au lavis (ce qui était prévu sur le contrat), l’éditeur ayant changé cet aspect au prétexte que les albums noir et blanc de la collection se vendaient moins bien que ceux en couleur. Et d’autre part, un dixième de l’album nous a été « supprimé », cette fois en raison de désaccords avec les directeurs de collection de l’époque. 

L'album était chez Rivages / Casterman / Noir : était il encore dispo ? Cela a-t-il été facile de récupérer les droits ?

Boris Beuzelin  - Cela a été simple de récupérer les droits chez Casterman, la collection n’existant plus depuis longtemps et l’album n’étant plus disponible au catalogue. Il nous a fallu simplement renégocier une nouvelle cession de droit avec Rivage ce qui c’est fait sans difficulté non plus.

Comment as-tu travaillé à cette nouvelle version à paraitre Boris ? En quoi va-t-elle être différente de la précédente : couleurs, pagination, format...

Boris Beuzelin  - Ici j’en reviens à ce que j’évoquais plus haut. L’album à paraître chez Komics Initiative sera une sorte de director’s cut puisque il qu’il sortira donc en noir et blanc, au lavis, tel que je l’avais conçu à l’origine. Nous inclurons également les pages qui avaient été supprimées ainsi que quelques autres modifications qui s’étaient avérées nécessaires suite à la disparition de cette séquence. Cela représente une dizaine de pages supplémentaires. L’album sortira en souple, au format  plus petit que celui de la collection d’origine. L’idée d’une version spécial collector est en réflexion avec un cahier spécial en fin d’album avec des bonus, comme mon découpage et celui écrit de Jean-Hugues, des recherches diverses ainsi que le début si qu’une première version dessinée, car au départ c’est moi qui devait adapter le roman de Siniac, mais ça c’est encore une autre histoire.

As-tu également retravaillé avec Jean-Hugues Oppel ?

Boris Beuzelin - Je me suis débrouillé seul sur cette nouvelle version, mais elle était déjà préexistante en réalité, ce qui ne nécessitait pas de retravaille particulier avec Jean-Hugues, mais il reste bien évidement entièrement associé au projet.

Merci Boris !


La campagne de financement a atteint les 100 % attendus en quelques heures … Carton plein pour Komics Initiative ! Mais il vous reste du temps pour y participer, et choisir entre la version traditionnelle, ou la version collector … ou les deux !

C’est par ici :

https://fr.ulule.com/carton-bleme-pierre-siniac-boris-beuzelin/

Carton blême ****

Scénario Jean-Hugues Oppel et dessin Boris Beuzelin d’après Pierre Siniac

112 pages - Sortie mai 2024

lundi 25 décembre 2023

[La montagne ça vous gagne ] – La Neige en deuil (Rue de Sèvres) : Dominique Monféry remporte le Prix Clouzot 2024

 Le jury du Prix Clouzot 2024 de la BD du festival « Regards Noirs » de Niort » présidé cette année par le scénariste Mark Eacersall, a fait son choix, début décembre.

Et après l’excellente adaptation de l’inadaptable et mythique Shibumi de Trevanian par Pat Berna et Jean-Baptiste Hostache c’est Dominique Monféry qui décroche la timbale pour son adaptation de La Neige en deuil un roman de 1952 signé… Henri Troyat.

L’histoire ? En voici le résumé par l’éditeur lui-même :

Isaïe et Marcellin, deux frères, vivent depuis toujours dans leur bergerie familiale au sein de la montagne. Tout semble pourtant les opposer. Isaïe, marqué par un grave accident d'alpinisme lui ayant laissé des séquelles, vit pour s'occuper de ses moutons. À l'opposé, Marcellin rêve de quitter la monotonie de ce quotidien pour rejoindre la ville et ouvrir son magasin. Un jour, un avion s'écrase au sommet de la montagne. On raconte qu'il abrite de l'or. Prêt à tout pour arriver à ses fins, Marcellin propose à Isaïe une dangereuse expédition à la recherche de l'épave, quitte à mettre en péril leur relation fraternelle.

 

Un prix Clouzot original, pour un roman noir d’un auteur dont ce n’était vraiment la spécialité… Henri Troyat, prix Goncourt 1938 (L’Araigne, Plon) était surtout connu ses sagas historiques et ses nombreuses biographies. La Neige en deuil lui avait été inpiré par le crash d’un avion d’Air India, le Malabar Princess sur le glacier des Bozons (Mont Blanc) en novembre 1950. 

 

Le roman de Troyat avait aussi été l’objet d’une adaptation ciné en 1956, par Edward Dmytryk, avec le duo Spencer Tracy-Robert Wagner dans les rôles principaux.

Une idée de projection pour la prochaine édition de Regard Noirs (7 au 9 mars 2024)

 

 En attendant, plongez-vous dans cette tragédie familiale, pour laquelle Dominique Monféry a réalisé de somptueux décors, et où la montagne oppressante et glaciale, vient tendre de plus en plus les relations entre les deux frères. Une vraie découverte !


La Neige en deuil ****

Scénario et dessin Dominique Monféry d’après Henri Troyat

Rue de Sèvres - 80 pages couleurs – 19 € 

Sortie le 27 septembre 2023

lundi 27 novembre 2023

[Vous m’en direz des nouvelles] – L’Alibi (Philéas), Miséricorde (Dupuis) et Gun Men of the West (Grand Angle) : 3 albums, 31 histoires

 Hasard des calendriers éditoriaux, trois collectifs regroupant la fine-fleur des scénaristes et dessinateurs et trices sont sortis en ce mois de novembre. Polar, Noir et Western : chacun y trouvera son genre préféré...

Je vous avais déjà tout le bien que je pensais du précédent collectif « Le Crime parfait », paru l’année dernière chez Phileas, à la même époque. L’éditeur récidive avec cette fois un autre thème, celui de l’alibi : cela donne dix histoires au coeur desquelles innocents comme coupables tentent de s’en tirer en invoquant toutes les raisons possibles et imaginables pour convaincre qu’ils n’y sont absolument pour rien dans l’affaire dans laquelle ils sont empêtrés… Et cela marche ? Pas sûr… A vous de voir ce que les auteurs de ce nouvel opus ont imaginé pour leurs personnages. Ce qui est certain c’est que vous allez vous retrouver plongé dans différentes époques, et que vous croiserez le KKK, une agence un peu spéciale, un clown, des jumeaux, un voisin trop bruyant et toute une galerie de personnages plus ou moins mémorables. Mon chouchou de ce collectif ? « Contre tout alibi » de Galandon et Blary, où un vieux couple se déteste si cordialement que… Ah ah, à vous de voir !

Un collectif tout aussi réussi que « Le Crime parfait », en attendant un autre ? Le polar ne manque pas de matière pour d’autres volumes…

 

Ce n’est pas une thématique mais un auteur qui fait le lien des sept histoires composant Miséricorde, chez Dupuis, et cet auteur n’est autre que l’illustre Jean Van Hamme (que je ne vous fait pas l’affront de vous présenter). Ce sont en effet sept de ses nouvelles, écrites entre 1968 et 2008, qui sont adaptées ici, sept textes rappelant que Van Hamme a toujours été cet écrivain imaginatif et inventif, roué à l’art de la chute ou à la création de situations à la tension montante. On est ici plus proche des épisodes angoissants de « SOS Bonheur » que des aventures mouvementées de Largo Winch, et on approche même les frontières du réel avec « Les Bretelles » (dessin Munera), une histoire qui aurait très bien pu être un épisode de la Twilight Zone. Mon chouchou de ce collectif ? « Les dents de l’amour » (dessins Christian Durieux) ou la naïveté dans toute sa cruelle splendeur.

 

 Enfin, ce rapide tour d’horizon se terminera à cheval, sur les traces des gunfighters du wild wild West : celui des Etats-Unis of course ! Gun Men of the west est le troisième collectif western de Grand Angle (Bamboo) après Go West ! Et Indians !, tous les trois sous la houlette et des scénarios de Tiburce Oger. Je n’ai pas lu les deux premiers, mais je vais me rattraper car ce Gun Men est vraiment excellent ! Oger et Hervé Richez se sont penchés sur la figure certainement la plus mythique de la légende western : le hors-la-loi. Une évidence aux yeux de Tiburce Oger, mais avec une autre approche que celle peut-être attendue en la matière : « Je souhaitais montrer des desperados différents de ceux qui sont connus du grand public. Nous évoquons les trajectoires de certaines figures, comme Billy The Kid, mais je me suis essentiellement intéressé aux oubliés de l’Histoire. Je voulais aussi rappeler que l’on pouvait être un hors-la-loi sans être forcément un homme, ni même un humain... » . Allusion ici à l’histoire la plus originale – et dingue ! - de l’album , « La ville qui pendit un éléphant », dessinée par Jef et Nicolas Dumontheuil. Mon chouchou pour ce collectif-là.Avec « Le Conteur » qui ouvre et clôt l’album, en liant toutes  les histoires par la voix d’ un armurier braqué par un jeune homme, à qui il décrit tout le catalogue des revolvers, carabines et autres armes de l’époque. Très bonne idée !

Trois bons albums, donc, qui ont également tous en commun le fait de faire découvrir – ou retrouver – des dessinateurs et dessinatrices, et d’aller voir le reste de leur œuvre. C’est aussi l’intérêt des collectifs ; susciter la curiosité.


L’Alibi – 10 histoires ****

Textes Galandon, Bétancourt, Lambour et Le Roux – Dessins Astier, Guérineau, Manini, Berlion,Robin, Blary, Springer, Beaulieu, Pujol, Froissard et Labiano

Phileas – 112 pages couleurs – 19,90 € - Sortie le 2 novembre 2023

Et édition Canal BD – 23 €

 

Miséricorde – 7 nouvelles ***

Textes Jean Van Hamme - Dessins Bazin, Bertail, De Jongh, Dijef, Durieux, Efa et Munuera

Dupuis – 96 pages couleur – 16,95€ - Sortie le 3 novembre2023


Gun Men of the West – 14 aventures de gunfighters ****

Scénario Tiburce Oger avec la collaboration d’Hervé Richez- Dessins Bertail, Blasco-Martinez, Carloni, Dumontheuil, Gastine, Hérenguel, Hirn, Jef, Labiano, Meynet, Rossi, Toulhoat et Vatine

Grand Angle – 112 pages couleur – 19,90 € - Sortie le 15novembre 2023

Et édition luxe noir et blanc – 120 pages – 29,90 €