Les éditeurs ont dans leur catalogue des séries parfois oubliées ou méconnues, et c'est souvent un bonheur de les (re)découvrir. Lou Cale « the famous » en fait partie, et les Humanos ont eu l'excellente idée de regrouper en une intégrale les cinq enquêtes de ce photographe de presse américain des années 40.
« La Poupée brisée » marque l'entrée en scène du héros, et dès sa première apparition, le décor est planté : Lou cale arrive au pied du pont de Manhattan, à 5 heures du mat, pour immortaliser une scène de mort violente, une jeune femme retrouvée disloquée sur le toit d'une voiture. Serveuse de bar de jour, elle était entraîneuse la nuit, et pour découvrir la vérité à son sujet le journaliste arpente New York et ses bas-fonds, qui demeureront un peu le décor récurrent de la série. C'est aussi dans ce premier album qu'apparaissent Juan Lopez Ruiz, lieutenant de police d'origine cubaine, et sa délicieuse femme Isabelle.
« Le Cadavre scalpé » mène Lou Cale sur la piste des indiens Mohawks, devenus ouvriers sur les chantiers de constructions des buildings de la ville. En s'intéressant de près à leur culture, Cale est amené à croiser la route du peintre Jackson Pollock et à nous faire méditer sur les rapports entre indiens et américains.
Dans « Les Perles de Siam », le reporter retrouve Jean de St Guineuve, un ami français perdu de vue depuis plus de vingt ans. Les retrouvailles sont dans des circonstances un peu spéciales : les entrepôts de cet ami viennent d'être incendiés. Et drame supplémentaire, Jean est assassiné peu de temps après, laissant Woon-Ha, sa jeune veuve Indochinoise, désemparée dans New York. Une histoire de trafic de perles au mécanisme ingénieux.
« L'Etrange fruit » attire Lou Cale jusqu'en Arkansas, pour un reportage sur la vie du Sud profond. Il va découvrir que la discrimination raciale y est toujours aussi vigoureuse, puisqu'un ouvrier fermier Noir vient d'être lynché pour avoir été surpris avec une jeune blanche... Cet épisode, rural, dur, est une véritable étude de mœurs, et Lou Cale apporte presque un regard d'ethnologue sur ses compatriotes. Avec en toile de fond sonore Billie Holiday et son "Strange fruit"...
Enfin, le « Centaure tatoué » le ramène à Coney Island où deux cadavres sans tête ont été retrouvés lestés au fond de la mer. Une signature mafieuse qui marque le début d'une histoire plus classique de règlement de compte, mais où Lou laisse parler ses origines irlandaises en se montrant à la fois provocateur et chaleureux.
Cette série de Warn's et Raives, qui a débuté en 1987 aux éditions du Miroir, a un charme certain, qui tient au caractère de son personnage principal, qui, avec son embonpoint et sa bonne bouille cache bien son jeu, et mène ses investigations jusqu'au bout. Il est, comme beaucoup des autres personnages qu'il croise au fil de sa vie, d'un humanité profonde, et Raives le fait parfaitement sentir, en dessinant en particulier les femmes d'une sa manière très sensuelle. Mais l'autre vraie vedette de Lou Cale c'est bien la ville, New York, ses rues, ses voitures, ses arrière-cours, ses cages d'escalier, ses bars enfumés, que les auteurs magnifient tout au long des pages. Une plongée urbaine, sombre et lumineuse à la fois, dans un pays d'un autre temps, où il était encore possible d'écrire côte à côte les mots rêve et américain.
Et pour vous plonger plus encore dans l'univers du duo Warnauts & Raives, et suivre leur actualité, rien de mieux qu'une visite sur leur blog "Ebauches".
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Lou Cale – Intégrale
Scénario Warn's et dessin Raives
Les Humanoïdes Associés, 2011 - 234 pages couleurs - 38 €
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