Ce blog est entièrement consacré au polar en cases. Essentiellement constitué de chroniques d'albums, vous y trouverez, de temps à autre, des brèves sur les festivals et des événements liés au genre ou des interviews d'auteurs.
Trois index sont là pour vous aider à retrouver les BD chroniquées dans ce blog : par genres, thèmes et éditeurs.
Vous pouvez aussi utiliser le moteur de recherche interne à ce blog.
Bonne balade dans le noir !

mercredi 28 juillet 2010

Moynot : une réédition et une expo


Les éditions Futuropolis ont la bonne idée de ressortir - sous une nouvelle couverture, l'excellent album d'Emmanuel Moynot, paru à l'origine chez Dupuis dans la collection Aire Libre.

Voici ce que j'en pensais à l'époque... et que je pense toujours, même si la couverture a changé...


Petit à petit, Emmanuel Moynot poursuit l’élaboration d’une œuvre qui mériterait de sortir de l’accueil discret qui lui a été réservé jusqu’à présent. Voici un auteur vers lequel tous les amateurs de Noir devraient se tourner, tant sa manière de rendre compte des tourments de l’âme humaine est digne des meilleurs romanciers du genre, et cette première incursion dans la très belle collection Aire Libre de Dupuis en est une preuve éclatante. En choisissant de raconter l’histoire d’une rencontre entre deux écrivains, Breuil, jeune français cynique et ambitieux, et Whales, monstre sacré, mais fatigué, de la littérature américaine, Moynot entrouvre les portes de la création et, surtout, celles des jeux d’influence à l’œuvre dans les mécanismes de cette création. Entre Breuil, à l’aube de sa carrière, et Whales, au crépuscule de la sienne, s’installe un étrange ballet où chacun des deux semble, tour à tour, prendre l’ascendant sur l’autre, comme deux adversaires d’une partie d’échec qui se soldera par l’abandon d’un des deux protagonistes, comme le suggère la couverture très réussie de l’album. La présence d’une dame sur cette première image, entre une tache de sang et une main – Whales ? Breuil ? – n’est d’ailleurs par fortuite : ce sont aussi les femmes qui sont à l’origine des pulsions créatives des deux hommes. Et ce sont elles qui sont au cœur du récit, femmes-objets ou maîtresse-femmes, toujours lucides pour leur protégé et donc forcément impitoyables… Une très bonne BD, toute en ombres, et que Moynot dédie « Aux femmes qui nous prennent pour ce que nous sommes et que nous ne prenons pas au sérieux ». Et que tous les hommes devraient lire.


Une exposition des planches de cet album, et d'autres, sera visible à Reims, à la médiathèque Jean Falala du 20 septembre au 14 octobre 2010

vendredi 23 juillet 2010

Martha Washington 1 - Le rêve américain (2010)

New York 1995. Martha Washington vient au monde dans un pays en proie au chaos. Elle grandit comme elle peut dans ce pays, en guerre contre le monde entier ou presque, et où le président instaure la loi martiale pour éviter la défaite électorale, où un cinglé auto-proclamé « chirurgien général » a tout pouvoir pour conduire à sa façon la « guerre contre la maladie », où la police et l'armée sont dans les rues... et où les forces de paix intérieures de la PAX accueillent la lie de la terre, effaçant les casiers judiciaires de tous ceux qui s'engagent à leur service. Le monde peut-il être surpris quand une bombe réduit en poussière la Maison Blanche et pulvérise la quasi-totalité du gouvernement, laissant le président Rexall dans un coma profond ? Pas vraiment, et certainement pas les soixante-dix septs groupes révolutionmaires revendiquant l'attentat... Martha assiste, du haut de ses 14 ans, à l'arrivée du nouveau président, aux idées progressistes et écologiques, et s'engage à son tour dans la PAX. Les ennemis intérieur sont tout aussi dangereux que ceux de l'extérieurs et la PAX est en guerre contre la Nation Apache et le Renouveau Aryen. Martha est au coeur de l'action, et va découvrir le double jeu d'un des ses officiers. Leurs destins sont alors inextricablement liés, et conduisent tous deux vers deux futurs possibles pour les Etats-Unis.

Lorsqu'en juin 1990 « Give me liberty » sort chez Dark Horse, les artistes aux commandes font figure de révolutionnaires pour le genre : Frank Miller vient de publier son « Batman : The Dark Knight returns », qui donnera définitivement une autre image de la figure du super-héros au public, tout comme Dave Gibbons, associé à Alan Moore, l'avait fait trois ans plus tôt avec les Watchmen. L'association était prometteuse mais l'affaire ne fut pas aussi simple ,comme le rappelle Gibbons dans la préface de cette réédition chez Delcourt. Zenda avait édité, de 1990 à 1991, une première traduction de cette oeuvre majeure du duo sous le titre « Liberty, un rêve américain», en 4 tomes au format classique et la voici regroupée aujourd'hui en un volume, et rétablie au format comics.

Relire cette histoire 20 ans après sa sortie est tout à fait surprenant : même si ni le monde, ni les Etats-Unis ne sont encore tombés da
ns le gouffre décrit par les auteurs, force est de constater la puissance visionnaire de leur Martha Washington... La panique à Wall Street, une catastrophe écologique majeure, un Président prix Nobel de la Paix... Tout cela ne vous rappelle rien ?
A côté de cet aspect prophétique, il faut aussi saluer le savoir faire de Miller, qui construit son scénario en se basant sur tout ce qui fait la mythologie américaine, la revisitant pour mieux
enfoncer le clou d'un pays au bord du précipice.

On sentirait d'ailleurs presque une volonté de réécrire l'histoire des Etats-Unis de la part de Miller, qui donne à son personnage central le même prénom que la femme du premier président des Etats-Unis, et qui ouvre son histoire par la célèbre formule de Patrick Henry «J'ignore quelle voie choisiront les autres. Quant à moi, donnez-moi la liberté ou donnez-moi la mort », prononcée à l'aube de la guerre d'Indépendance.
Dave Gibbons réussit à le suivre sur ce terrain, et cela donne des fausses couvertures de grands magazines, une machine guerrière en forme de gigantesque mangeur
de hamburger, un Mont Rushmore à six têtes... Autant de symboles piétinés et qui ponctuent l'histoire de Martha, héroïne malgré elle. Gibbons est tout à fait à son aise dans ce registre de la politique fiction violente, et son dessin, d'une grande lisibilité, est d'une efficacité redoutable, à laquelle participent aussi grandement que les couleurs de Robin Smith,
Delcourt a prévu de publier l'intégrale de Martha Washington, en trois volumes. En attendant les deux prochains, prenez-le temps de savourer celui-ci.


Martha Washington, tome 1 : Le Rêve américain
Texte Frank Miller et dessin Dave Gibbons
Delcourt, 2010 – 200 p. couleurs
Collection Contrebande - 19,90 €

lundi 19 juillet 2010

Polar et petits formats : des trésors à redécouvrir

Vous les avez sûrement remarqués au détour d'un vide-grenier estival, coincés entre deux piles d'assiettes dépareillées et un carton de peluches fatiguées. Chez votre bouquiniste favori, ils vous ont toujours fait de l'oeil mais vous n'avez pas encore cédé à la tentation, ni même regardé d'un peu plus près. Et pourtant, les petits formats, ces bandes dessinées de poche vendues en kiosque, sont une véritable mine d'or pour l'amateur de polar.
Pas plus tard qu'hier j'ai mis la main sur cet exemplaire de "Coup Dur", un des nombreux titres « Mon journal », avec au sommaire, trois bandes d'espionnage, d'inégales valeurs certes, mais méritant franchement l'attention. Et réservant une surprise : la présence du grand Alberto Breccia, au dessin sur la série « Département zéro ». Il est vrai que, longtemps, c'est dans les pages de ces centaines de fascicules mensuels qu'ont été traduits et publiés, parfois pour la première fois, les meilleurs dessinateurs étrangers. Alors, il ne faut pas s'arrêter à l'aspect parfois juvénile des couvertures, car assez souvent, elles ne correspondent pas nécessairement au contenu, et derrière une façade d'un Akim on pouvait ainsi découvrir, par exemple, les Dauphins, une série d'aventures policières assez rythmée, alors que sous la couverture de Maxi, se cachaient des récits plus strictement policiers, comme Drake & Drake, détectives. Des exemples comme ces deux-là, pris au hasard dans ma - toute petite - bibliothèque de petits formats, je pourrai vous en trouver des dizaines...
La difficulté principale est surtout d'identifier les séries polar, quand elles ne sont pas clairement repérées par les titres ou couvertures des fascicules. Bédépolar consacrera un jour une rubrique spéciale à toutes ces BD disparues... Mais en attendant, des fans de ces revues ont déjà fait un travail de recensement colossal, et si vous souhaitez explorer cet univers, rendez-vous, par exemple, sur le site « Wiki - PF », le wikipédia du petit format, c'est une véritable mine.
Moi, je vais voir ce que donne ce « Ressuscité de l'an 2000 »...

vendredi 16 juillet 2010

Une balle dans la tête (2010)

Belfast, début des années 70. Angus Mclochlain, flic infiltré depuis deux ans dans un groupe d'activistes catholiques de l'IRA, a gagné la confiance de Nick Jone, le chef du groupuscule, mais ne s'entend guère avec Graham, son frère cadet, qu'il trouve impulsif. Et Cheryl, la petite amie de Nick, garde ses distances avec Angus, dubitative sur la sincérité de ses engagements. Alors que le travail de taupe de Mclochlain commence à porter ses fruits, un événement vient bouleverser la vie du groupe : une manif dégénère et Nick est plongé dans le coma. Graham veut prendre le pouvoir et réclame une vengeance contre les forces de l'ordre anglaises... Angus essaie de le dissuader, en vain, mais Nick se réveille. La situation reste tendue, et pour tenter d'empêcher un massacre couru d'avance, Angus propose d'essayer d'identifier le tireur qui a atteint Nick, et de ne s'en prendre qu'à lui. Et pour cela, il utilise une méthode occulte qui lui permet d'entrer dans l'esprit de Nick et de « voir » le tireur... Ce qu'il découvre va constituer un véritable choc pour Angus.

Corbeyran a choisi la voie du polar fantastique pour évoquer les années d'affrontement entre l'IRA et les britanniques. Et il s'attache à nous faire vivre cette lutte de l'intérieur, à suivre le quotidien des anonymes qui l'ont menée. Il convoque pour cela une galerie de personnages très forts, le principal, Angus, demeurant au final le plus mystérieux : voilà un homme féru de sciences occultes, marqué par un athéisme réel, et qui, vaguement humaniste, ne semble guère porté sur la violence. Ayant perdu la foi, il endosse le rôle de l'infiltré presque sans y penser, mais on sent poindre un certain idéalisme au fond de lui. C'est un personnage très attachant, d'autant plus que Jef l'a parfaitement réussi et qu'il a vraiment la « gueule de l'emploi » : tout l'aspect occultisme de cette histoire passe très bien avec cette tête-là... Les autres protagonistes sont tout aussi bien campés, et au final ce diptyque oscille entre suspense, drame historique et fantastique, dans un équilibre quasi-parfait. A aucun moment on ne décroche – car c'était tout de même le risque avec un tel mélange de genres – et ce qui reste la dernière page tournée, c'est le sentiment d'avoir lu une oeuvre forte, originale et... mélancolique. Surprenant !


Une Balle dans la tête
Scénario Eric Corbeyran et dessin Jef

Livre 1 - Angus
EP, 2009 - 48 pages couleur


Livre 2 – Dara
EP, 2010 – 48 pages couleurs

Collection Atmosphères – 13,90 € chaque
– Les deux tomes sous coffret 38 €

mercredi 14 juillet 2010

Braquages et bras cassés (2010)

Hervé Maréchal, alias Boule, gloire déchue de la course automobile, vivote dans l'oubli : il tient un garage miteux avec ses deux fils, Gaz et Dante. Cela ne l'empêche pas de réussir de beaux coups de temps à autre, comme cet échange qui laisse rêveur les deux rejetons : une BMW nickel contre un scooter hors d'âge. Moyennant un arrangement, bien entendu... Mais Manu et Vito, les deux hommes qui sont venus proposer la BM à Boule ignoraient une chose : c'est que la voiture avait servi à un braquage et que le butin est resté à bord. C'est quand ils se rendent compte de leur bévue que les ennuis commencent, pour tout le monde, avec l' entrée en piste des instigateurs du casse, un duo de flics véreux...

Eh bien, voici une véritable tragi-comédie, en trois actes, avec entrée en scène des acteurs par trios. En fait, toute l'intrigue tient en une suite d'événements, rapprochés dans le temps et s'enchaînant très vite, et que chacun des protagonistes vit à sa façon. L'astuce narrative consiste à décrire les actions plusieurs fois, du point de vue des trois trios de l'album : procédé, certes pas nouveau, mais qui dynamise le récit d'autant plus que Benjamin Fischer réussit à ménager son suspense jusqu'au bout. Ses personnages sont de vraies caricatures de caïds, avec ce qu'il faut de poisse et d'imbécilité chevillées au corps pour en faire de parfaits loosers. Ils évoluent dans une région liégeoise industrieuse et enneigée que Van Linthout restitue avec bonheur, comme le suggère les pages du cahier de photos de repérages ajouté à la fin de l'album. Il faut saluer le travail de la Boîte à bulles, éditeur discret, qui publie là un livre des plus réussis, au format roman très agréable. Et un de mes préférés de cette année.


Braquages et bras cassés

Scénario Benjamin Fischer et dessin Georges Van Linthout
La Boite à bulles, 2010 – 112 p. noir et blanc
Collection Contre-jour – 17 €

lundi 12 juillet 2010

Juin 2010 : 33 nouveautés et rééditons











BAMBOO

Thomas Silane 5 : fuites – (Zaghi, Buendia et Chanoinat) – 12,90 €

CASTERMAN / KSTR
Lefranc 21 : Le Châtiment – (Taymans, Drèze et Delperdange) – 10 €
Le Tueur 8 : l'ordre naturel des choses – (Jacamon et Matz) – 10,40 €)
(R) – 120, rue de la gare – (Malet et Tardi) ) – 9,95 € (Série BDDT)
(R) – Du plomb dans la tête (Wilson et Matz) – 9,95 € (Série BDDT)

DARGAUD
Belleville story 1 : Avant minuit – (Perriot et Malherbe)– 15,50 €
Metropolitan 1 : Borderline – (Bonneau et Bonneau) - 13,50 €

DELCOURT
Jour J 2: Paris, secteur soviétique - (Pécau, Duval et Séjourné) – 12,90 €
Le secret de Mohune 3 : La Malédiction – (Rodolphe et Hé) – 12,90 €
Smoke City 2 -(Mariolle et Carré) - 13,95 €
(R) – Martha Wahington 1 : Le rêve américain – (Miller et Gibbons) – 19,90 €

DUPUIS
Seuls 5 : Au coeur du maelström– (Velhman et Gazzotti) - 9,95 €
Sarah 2 : Les enfants de Salamanca 2 - (Bec et Raffaele) – 13,50 €
(R) – Théodore Poussin : Intégrale 1 – (Le Gall et Yann) – 24 €
(R) – Gil Jourdan : intégrale 3 – (Tillieux) – 24 €

EMMANUEL PROUST (EP)
(R) – Amerikkka : Intégrale 2 – (Martin et Otero) -29,90 €
Agatha Christie 20 : Les Oiseaux du lac Stymphale - (Marek) – 11 €

FUTUROPOLIS
(R) - Pourquoi les baleines bleues viennent-elles s'échouer sur nos rivages ? - (Moynot) – 16 €

GLENAT
Disparitions 4 : retour aux sources - (Mazeau et Wachs) – 9,95 €
Gil Saint André 9 -: l'héritage sanglant - (Kraehn) – 9,95 €
Les Munroe 1 : La Vallée du rift – (Périssin et Pavlovic) – 13,50 €
(R) – Gil Saint André 1 à 8 – (Kraehn et Vallée) – 9,95 €

LOMBARD
IR$ 12 : Au nom du président – (Desberg et Vranken) – 10,95 €
All Watcher 4 : La spirale Mc Parnell – (Desberg et Mutti) – 10,95 €
(R) – IR$, dyptique 1 : Les Nazis et l'or des Juifs – (Desberg et Vranken) – 14,95 €
(R) – IR$, dyptique 2 : Narcotrafics – (Desberg et Vranken) – 14,95 €
(R) – IR$, dyptique 3 : Federal corruption – (Desberg et Vranken) – 14,95 €
(R) – IR$, dyptique 4 : Petrodollars – (Desberg et Vranken) – 14,95 €
(R) – IR$, dyptique 5 : Les comptes secrets du Vatican – (Desberg et Vranken) – 14,95 €

PANINI
The losers 2 : Cheik et mat – (Diggle et Jock) – 29 €

VENTS D'OUEST
Le Sang des bâtisseurs 1 – (Le Galli et Jaffredo) – 13,50 €
Les Carrés 3 : carré blanc – (Adam et Martin) – 12 €
(R) – Tard dans la nuit : intégrale – (Yoro et Djian) – 15 €



dimanche 27 juin 2010

Les démons des Carpathes 2 - Le mangeur d'âmes (2010)

Prisonniers du château du comte Brasov, Mulligan et Mackinlay, rejoints pas Arthur Conan Doyle lui-même, cherchent un moyen de s'évader de leur sinistre geôle transylvanienne : ils ne peuvent la quitter car de terribles créatures rôdent autour des lieux. Des monstres nés des esprits imaginatifs des grands auteur de romans fantastique de l'époque... Pendant ce temps, le comte Brasov, réincarné en Vachousek, le sanguinaire « mangeur d'âmes » créé par Sean Mulligan lui-même, sillonne l'Europe à bord d'un dirigeable, en compagnie de Moriarty et Dracula. Ils sèment la mort et la terreur sur leur passage. Qui pourra les arrêter ?

Après avoir exposé les personnages et le piège machiavélique tendu par le comte Brasov dans le 1er tome, Marniquet et Chanoinat font monter la tension d'un cran en décrivant la désolation et l'horreur causées par des créatures infernales. En construisant leur récit avec un montage en parallèle, ils installent leur suspense sous la forme d'une course contre la montre entre le Bien et le Mal.
L'idée de faire jaillir des personnages de fiction – cauchemardesques pour la plupart – continue de fonctionner, et elle n'est d'ailleurs pas sans rappeler les romans foisonnants de Jasper Fforde et de son héroïne Thursday Next, détective littéraire du futur. Le style un peu raide – dans les personnages – de Marniquet n'est pas pour rien à l'étrangeté qui plane sur cette curieuse série. Etrangeté accentuée par cette furieuse impression de se retrouver au beau milieu des films horrifiques des années 50 qui firent la gloire de la Hammer, par exemple. Un petit bémol, sur ce second tome : une variation incessante de la taille de la typo dans les bulles gâche un peu le plaisir de lecture et casse le rythme. Mais bon. Mieux ne vaut pas trop s'offusquer, des fois que mister Hyde soit, là, juste derrière la porte...
Les Démons des Carpathes - Scénario Marniquet et Chanoinat, dessin Marniquet

Tome 1 – Le Testament du Comte Brasov
Delcourt, 2009 - 48 pages couleur - 12,90 €

Tome 2 – Le Mangeur d'âmes
Delcourt, 2010 – 48 pages couleurs - 12,90 €

dimanche 20 juin 2010

Bill Baroud et Bob Marone : la rencontre !

Amis et amies de la Grande Bande Dessinée, vous allez dans quelques instants, grâce à « Bédépolar », vivre un moment de haute félicité : la rencontre - exclusive ! - entre deux de nos plus grandes gloires nationales, deux aventuriers dans l'âme, Bob Marone et Bill Baroud. Au prix de mille ruses et deux consommations originales, j'ai pu réunir à la terrasse d'un café breton nos deux stars du neuvième art, pour une – hélas trop brève - conversation sur leur carrière. Avec en ligne de mire la réponse à la question finale : mais alors, c'est qui le vrai héros de tous les temps ?

Bédépolar – Messieurs, j'imagine qu'il n'est pas besoin de faire les présentations...

Bob Marone (haussant les sourcils) – Eh bien, j'imagine que monsieur est le représentant de la ligue des Alcooliques Repentis, avec un nez pareil... Rouge, qui plus est...

Bill Baroud (plissant les paupières) – T'es qui, toi, là, le nabot ? Sache que je suis connu sous le sobriquet de « sauveur du monde libre », et que sans moi, tu serais en train siroter une vodka russe et non cette excellente Budweiser.

Bob Marone (sourire en coin) – Ce breuvage est du pipi de chat, et si votre vue n'était pas si basse, vous constateriez que je bois un thé aux herbes antédiluviennes. Ramenées de l'ère jurassique. Mais j'imagine que ce mot vous est étranger...

Bill Baroud (énervé) – Ouah, l'autre, là ! Moi aussi j'ai voyagé dans le temps ! J'ai même testé un prototype de machine révolutionnaire. Avec ça j'ai presque sauvé Elvis, alors pas la peine de faire le malin avec ta boisson de bonne femme.

Bédépolar – Justement, messieurs, vous avez vécu tous les deux les aventures plus fantastiques les unes que les autres. Qu'est-ce qui vous a permis de vous en sortir ?

Bill Baroud – Une bonne dose de testostérone, un bon flingue et surtout un sixème sens à tout épreuve. Grâce à lui, j'ai débusqué plus d'une fois le communiste qui se terrait derrière le trader, croyez-moi. Au FBI, on est sur-entraîné.

Bob Marone : Je pratique la gymnastique,alliée à une stricte hygiène de vie. J'évite les boissons fortes qui empêchent d'analyser clairement les situations critiques et mange du poisson tous les vendredis. Mais j'ajouterai que tout cela ne serait rien sans ce sixième sens qui nous caractérise, nous autres héros, et qui nous permet de faire face au danger en toutes circonstances.

Bill Baroud – Affirmatif ! Je suis d'accord avec le nabot. Moi j'appelle cela le flair, et c'est ce qui nous démarque, nous autres aventuriers des temps modernes, de l'homme de la rue, qui entre nous, si on le cuisine un peu, ne tardera pas à avouer qu'il est communiste.

Bob Marone – Ah ça, vous m'énervez à la fin ! Qu'est ce que cette manie de voir des communistes partout ? Vous ne saviez pas que l'espèce est en voie de disparition, et qu'elle est protégée ?

Bill Baroud (outré) – Protéger les rouges ? Mais qu'est-ce-que c'est que ce Jean-foutre ? Je crois que tu n'as pas tout à fait compris les missions qui sont les tiennes, old boy. Je sens que je vais bientôt être récompensé pour ta rééducation.

Bob Marone (sur ses gardes) – Attention, gredin, bas les pattes ! Tu ne sais pas à qui tu as affaire...

Bédépolar – Messieurs, messieurs, calmons-nous. Monsieur Baroud, vous parliez à l'instant de récompense. J'imagine que vos aventures vous apportent toutes sortes de satisfactions ?

Bill Baroud – C'est vrai. J'ai oublié de vous le dire, mais un autre de mes petits noms, c'est le « gravement couillu ». C'est aussi parce que j'ai un certain succès auprès des femmes. C'est la rançon du guerrier. J'imagine que vous voyez ce que je veux dire, Bob.

Bob Marone – Un peu, oui. Mais chacun ses goûts . Figurez-vous, c'est d'ailleurs amusant, que j'ai un très bon ami qui s'appelle Bill. Nous partageons beaucoup de moments ensemble, y compris les plus... intimes. Nous avons une vision assez personnelle du repos du guerrier.


Bill Baroud (choqué) – Mais alors... mais alors... Dois-je bien comprendre ? Vous êtes la honte de notre caste ! Je crois que je vais être obligé de vous ramener dans le droit chemin.

Bob Marone (ricanant) – Je crois que tu vas comprendre ta douleur, stupid boy ! Avec Bill, nous partageons tout... y compris les raclées que nous donnons aux malpolis.
(appelant vers une voiture garée non loin) – A moi, mon vieux Bill ! Je crois que tu vas devoir corriger un malotru...

Un grand type roux en kilt s'est alors pointé, et à partir de ce moment, l'entretien a un peu dégénéré, et c'est le moment que j'ai choisi pour m'éclipser, bien content d'avoir réussi à récolter la parole de nos deux gaillards. Avec tout ça, je n'ai pas eu le temps de savoir qui était le vrai héros de tous les temps. Je vous laisse libre de vous faire votre propre opinion, en lisant ces deux formidables albums racontant les exploits de Bob et Bill. Deux sommets, assurément.




Bob Marone - Le Dinosaure blanc
Texte Yann et Lucie, dessin Conrad
Dargaud, 2010 - 98 p. coul., 25 €



Bill Baroud - L'intégrale
Texte et dessin Manu Larcenet
Fluide Glacial, 2010 - 216 p. noir et blanc.
- Collection Or - 14 €

mardi 15 juin 2010

Commandant Achab 2 - Ma jambe de plastique

Tosca, jeune chanteuse à la mode, est retrouvée morte, et son fiancé avoue, d'après une déclaration de la police, en être le meurtrier. Mais les choses sont un peu plus compliquées et le flic qui a annoncé publiquement les aveux du petit ami, chanteur lui aussi, se retourne vers le commandant Achab pour le sortir de la panade : le coupable n'est pas le bon... Achab reprend l'affaire, mais rien n'est facile quand on a une jambe en moins, et que son plus proche collaborateur n'est autre que le fils d'un homme qu'on a abattu...

Cette nouvelle série – dont on peut lire les tomes de façon indépendante – met en scène un duo de flics pas tout à fait comme les autres. Ou plutôt si, comme les autres, puisqu'il s'agit bien de suivre leurs enquêtes – ici, dans le monde du showbiz parisien – mais elles ne semblent finalement être là que comme toile de fond, comme prétexte. Plus que la résolution d'un mystère criminel, c'est bien les relations humaines que privilégient Piatzszek et Douay : que ce soient celles d'Achab et de son second, Karim, celles de Karim et sa mère mourante, ou encore celles d'Achab avec la femme médecin qui s'occupe de sa jambe amputée... Car le héros de cette série est infirme, ce qui n'est pas très courant pour un flic... ni pour un personnage de bande dessinée. Et la « mise en scène » de cette infirmité, traitée sous ses aspects physique comme psychologique, l'est avec une grande sensibilité. A bien y regarder, c'est bien ce handicap qui est au coeur de l'album... comme le suggère d'ailleurs le titre de ce second tome.
Commandant Achab ? Un polar qui n'oublie pas de poser quelques questions à ses lecteurs.


Commandant Achab
, tome 2 – Ma jambe de plastique
Scénario Stéphane Piatzszek et dessin Stéphane Douay
Soleil, 2010 – 56 pages couleurs – Collection Quadrants – 14,30 €

samedi 12 juin 2010

Spirou et Fantasio : alerte au Zorkons !

Amis du monde entier, réjouissons-nous : Spirou is back ! Le numéro 3766 - daté du 16 juin 2010 le proclame haut et fort : en route pour de molles aventures ! C'est le duo Vehlmann / Yoann qui reprend en mains les destinées de la série phare de Marcinelle, et, à la lecture des onze premières planches parues dans ce numéro, il y a effectivement de quoi se réjouir.

C'est un retour au bercail pour les héros, puisque les voici à Champignac, où il se passe - évidemment - des choses plus que bizarres. On y retrouve des vieilles connaissances, et l'épisode démarre fort. Mais je ne vous en dis pas plus, si ce n'est que Fabrice Vehlmann commente en guise de préface à cette nouvelle aventure chaque période de la vénérable série, de Rob-Vel à Morvan et Munuera. Intéressant !

Je ne peux m'empêcher de constater avec une légère pointe de déception que Chaland a été oublié dans la liste... Même s'il n'a jamais été officiellement dessinateur de la série, son Spirou à lui, hommage direct à Franquin, était loin d'être anecdotique. Il a même fait la une du journal à l'époque.
Pas grave ! Vehlmann et Yoann sont eux bien là, alors rendez-vous dans les prochains numéros du magazine pour voir si cette nouvelle aventure est aussi réussie que leur convaincant coup d'essai de 2006 ("Les Géants pétrifiés").


mardi 8 juin 2010

Jason Brice à l'assaut du paranormal

Jason Brice est un détective à l'esprit cartésien et vit dans le Londres des années 20. Un Londres où les médiums ont pignon sur rue et se font fort d'entrer en contact avec l'au-delà pour permettre à de pauvres femmes naïves d'avoir des nouvelles de leurs chers disparus. Theresa Pendergast a, elle, une autre requête : elle vient de lire son propre assassinat dans un livre plus que troublant... et engage Brice pour faire toute la lumière sur cette affaire qui la terrorise. Les ténèbres vont en fait s'abattre sur le détective, qui va en fait tuer sa cliente et mettre le feu à sa demeure pour couvrir son forfait. Telle était la situation à l'issue du premier tome.
Dans ce deuxième tome, « Ce qui est caché », Brice, qui commence fortement à douter de lui-même, essaye de découvrir quelles forces sont à l'oeuvre dans cette affaire qui l'a transformé en criminel. Et la solution, il pense la trouver en se lançant à la recherche de Morgan Fatoy, l'écrivain, disparu mystérieusement, qui avait prédit la mort de Thérésa Pendergast. Le détective commence par se plonger dans écrits de Fatoy, mais les choses se précisent quand il rencontre un journaliste littéraire qui a bien connu l'écrivain...

Cette série est à ranger dans le cercle assez fermé des « détectives de l'étrange », et s'il n'est pas facile de marcher sur les traces de Carnacki ou Harry Dickson, archétypes du genre, force est de constater que le détective créé par Alcante tient parfaitement la route. Qui plus est, avec ce deuxième tome, le scénariste inverse les rôles, et de chasseur, le héros devient proie : un renversement qui conduit à une forme de suspense différente du premier tome, mais aussi captivante. De son côté, Jovanovic a réussi à transposer en images fortes l'inquiétude planant tout au long de l'histoire, et son dessin, réaliste, est parfois proche de la perfection. Certaines planches sont franchement superbes. Il est à espérer que le tome trois, à paraître cette année, vienne conclure en beauté ce thriller fantastique.

Jason Brice, tome 1 : Ce qui est écrit
Texte Alicante et dessin Jovanovic
Dupuis, 2008 – 56 p. couleurs – Collection Repérages
13,50 €
(La bande annonce, en prime !)

Jason Brice, tome 2 : Ce qui est caché
Texte Alicante et dessin Jovanovic
Dupuis, 2009 – 56 p. couleurs – Collection Repérages
13,50 €

vendredi 4 juin 2010

Mai 2010 : 27 nouveautés et rééditions

Et voici ma traque mensuelle des sorties polar, tous genres confondus, (R)ééditions comprises, 27 pour ce mois de mai. En bas de liste, un clic sur "sorties du mois" permet de retrouver l'ensemble des messages sur les sorties mensuelles. Rendez vous début juillet pour les sorties de juin.

Les 400 COUPS
Lionel et Nooga 1 : Bandes et contrebandes – (Goulet, Vaillancourt et Duguay) – 17,95 $
L'Ocelot 1 : l'éveil du Fauve – (Bonnier) – 18,95 $



BAMBO
O
Le Dessinateur 2 – (Trolley, Erroc et Dimber) – 12,90 €




CASTERMAN / KSTR

Caroline Balwin 14 : Free Tibet – (Taymans) - 10,40 €
Canardo 19 : Le Voyage des cendres – (Sokal) – 10,40 €
Seconde chance - (Ozanan et Renard) – 14 €

DARGAUD
Les Eternels 5 : La Cire qui chante – (Yann et Meynet)– 13,50 €

DELCOUR
T
Le secret de Mohune 2 – (Rodolphe et Hé) – 12,90 €
Le démon des Carpathes 2 : Le mangeur d'âmes
– (Chanoinat et Marniquet) – 14,95 €
Mafia story 6 : La chute de Lucky Luciano (Chauvel et Le Saëc) – 14,95 €
Le Casse 3 : Soul man – (Chauvel et Denys) - 13,95 €


DRUGST
ORE
(R) - Les Désarmés (intégrale) – (Mezzo et Pirus) – 22 €


DUPUIS

Haute sécurité 5 : L'ombre d'Ezekiel – (Callède et Gihef) – 10,95 €
(R) – Largo Winch (Dyptique 4) – (Van Hamme et Francq) – 22 €
(R) – Secrets : L'écharde (intégrale) – (Giraud et Duvivier) – 24 €


FLBL
B
Dead end – (Paulette P., Lucas et Jarry) – 5 €


FLUIDE GLACIAL
(R) – Bill Baroud (Intégrale petit format) – (Larcenet) – 14 €


FUTUROPOLIS
Lui – (Djian / Peyraud) – 24 €


GALLIMARD (Bayou)
J'ai pas tué de Gaulle - (Bruno Heitz) – 17 €
Les derniers jours d'Ellis Cutting – (Vieille) 16,50 €

GLENAT
Tête de marron – (Mousse) – 13 €


JOKER

Les Grands conteurs : pas de diams pour un cave – (Guilmard et à la Audiard) – 13,50 €

SOLEIL

Commandant Achab 2 : ma jambe de plastique – (Douai et Piastszek) – 14,30 €
Quand souffle le vent des îles – (Debois et Fino, d'après Le Braz) – 13,50 €
Sherlock Holmes et les vampires de Londres – (Cordurié et Laci) – 13,50 €
(R) – Harry Dickson (intégrale 2) – (Roman et Nolane) – 12,95 €


VENTS d'OUEST
L'Age des Corbeaux – (Parno et Jicé) – 19,50 €

mercredi 2 juin 2010

Re-mind 1 (2010)

John Geb travaille dans un hôpital. Une nuit, deux hommes salement blessés sont amenés aux urgences et Geb a l'immense surprise de reconnaître l'un d'eux : son fils Ethan, évadé de prison, dont il n'avait plus de nouvelles. Laissé entre les mains d'un confrère, Ethan s'en sort, mais alors que John s'occupe de l'autre blessé, dans un état plus critique, deux agents du FBI font irruption dans le bloc opératoire. Leur exigence est formelle : il faut laisser mourir le blessé ! Abasourdie l'équipe médicale obtempère et passe la main aux agents, dont l'un place un curieux appareil sur le crâne du mourant. Au moment de son dernier souffle, le film de sa vie se rejoue dans sa tête... et est enregistré par la machine. Les agents du FBI ne perdent pas un instant : la lecture de la mémoire du mort va permettre de déjouer un plan terroriste d'envergure... sauf que la mort d'Ethan – assortie de l'épisode du casque enrgistreur - semble indispensable pour connaître les détails ultimes dudit plan. John Geb ne voit pas les choses tout à fait comme cela pour son fils...

Postulat de ce thriller : la légende selon laquelle chacun revoit sa vie en accéléré devant ses yeux à l'instant fatal du trépas n'en est pas une. Cela a même été scientifiquement prouvé. Partant de là, Alcante construit une intrigue assez ambitieuse mêlant terrorisme et haute technologie, où le visionnage des « films » des morts devient un moyen de lutte sophistiqué contre l'ennemi. Intéressant, d'autant que le scénario n'oublie pas la dimension humaine – ou inhumaine, plutôt – de l'affaire : quelle attitude adopter pour ceux qui veulent obtenir ces souvenirs lorsque ceux qui les détiennent sont de votre propre camp ? On est là proche des affres existentiels qui tiraillaient – parfois – Jack Bauer dans 24 h chrono... S'ajoute à cela une relation père / fils, pour l'instant ébauchée, mais prometteuse, et une réflexion plus globale sur la toute-puissance de la science.
Re-Mind reste aussi avant tout une BD où l'action prime, et Mutti, dessinateur italien qui oeuvre par exemple sur l'excellente série Nero, possède le trait efficace pour ce genre d'album. Suite et fin en octobre de cette histoire assez prenante.

Re-Mind 1
Texte d'Alcante et dessin d'Andrea Mutti
Dargaud, 2010 – 48 pages couleurs – 10,95 €