Petite soirée entre
amis. Dans le salon, on se laisse un peu aller : allongé sur le dos,
la chemise ouverte sur une bedaine rebondie, un homme ouvre un large
bec, où le vin coule directement du cubi tenu par une invitée en
bas résille. Adossé à un mur, sous une affiche de Grosdada, un
autre cuve, en ronflant, une bouteille vide et un verre renversé à
ses côtés. Sur le canapé, un troisième convive, stoïque, ne
semble pas prêter attention à son voisin, qui a baissé son froc à
demi et s'apprête à donner un happening qui s'annonce spectaculaire
et odorant. Et au premier plan la maîtresse de maison, Marie,
apparemment pas gênée par le spectacle environnant, appelle un
dénommé Victor, qui n'est autre que son homme. Mais Victor ne
répond pas, car il est occupé aux toilettes avec une blonde à
genoux à ses pieds, très désireuse de lui faire plaisir.
Semble-t-il. Victor n'a pas l'air contre cet enthousiasme et, pris
par sa fougue lors d'un changement de position judicieux, il pose le
pied sur le couvercle des WC. C'est le début des emmerdements : sa
jambe passe au travers du couvercle et il se trouve coincé....
Quelques mouvements risqués plus tard, il tombe en fracassant la
porte des chiottes et se retrouve par terre, devant tout le monde, le
pied toujours pris dans le couvercle jacobin-delafoniste. La journée
va être longue pour Victor Anthracite...
Bon, je vous préviens :
c'est comme ça jusqu'au bout. Car après cet épisode initial, notre
héros va être entraîné dans un tourbillon d'événements qu'il
peinera à maîtriser. Voire qu'il subira sans vergogne. Il croisera
la route de petites frappes, trouvera un sac plein de fric, n'en
profitera pas beaucoup, fera connaissance avec un âne (un vrai, pas
un couillon comme lui) et, et, et... j'arrête là la description de
la tragique destinée de Victor Anthracite, personnage central de ce
pastiche de série noire écrit et dessiné par Gérald Auclin. En 75
pages au petit format (avec 3 ou 4 cases par page), sous jaquette
imitant la célèbre collection de Gallimard, l'auteur nous livre un
petit bijou de grand n'importe quoi. Le style graphique est pour le
moins sobre, sans chichi, et les ingrédients du récit sont du fric,
du cul, des flingues (un peu) et des abrutis (pas mal). Franchement,
c'est assez roboratif : si vous êtes déprimé et tout mou,
lisez-donc "Dur-à-cuire"; ça donne la pêche. Mais ne
trainez pas : ce collector en puissance a été tiré à 50
exemplaires (numérotés je vous prie) et j'imagine qu'il ne court
pas les rues. Je l'ai trouvé à Angoulême sur le stand des éditions "Hoochie
Coochie", et le mieux est encore de passer par le blog de la
maison mère, juste ici.
Une maison sérieuse, la
preuve, elle s'apprête à rééditer l'album de Mokeït "La
chute vers le haut", un petit chef-d'oeuvre paru en 1987 dans la
collection "X" de Futuropolis.
Dur-à-cuire
Scénario et dessin
Gérarld Auclin
The Hoochie Coochie, 2014
–75 pages noir et blanc - 9 €
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