Dans la catégorie «comics», il faut saluer les efforts de La Boîte à Bulles qui poursuit son travail de traduction d’un auteur britannique encore confidentiel, Nabiel Kanan, dont la dernière mini-série Les Noyés lorgne franchement du côté du Noir. L’album s’ouvre sur des flots, sombres, puis les deux planches suivantes, trois grandes cases muettes, mettent en scène un homme au pied d’un ponton et dont le regard semble porter de ces flots à une grande tour marquée d’un « Q », là-bas, de l’autre côté du fleuve. Ce prologue un peu mystérieux lance l’histoire de la chute annoncée de James Quinn, un magnat de la presse britannique, dont l’empire a vacillé le soir même de l’inauguration de la tour symbolisant sa toute-puissance : une des invitées s’est noyée en tombant du bateau où se déroulait la réception. Mais était-elle invitée ? Et qui était-elle vraiment ? Perturbé par l’événement, et des hallucinations inquiétantes, Quinn délaisse sa femme, qui compte bien le lui faire payer. La destinée de ce couple de la haute société croisera celle de Hayley, jeune toxicomane dépressive et endettée, et celle d’un professeur fou de jalousie. Entre autres personnages. Et c’est bien dans cet entrecroisement de caractères, forts ou faibles, et dans cette plongée au cœur des sentiments, que Nabiel Kanan réussit à nous entraîner, laissant au second plan le contexte médiatico-financier de son histoire. Son dessin sobre, jouant pas mal avec les ombres des visages et privilégiant les petites cases, n’est certes pas celui d’un virtuose, mais il est parfaitement adapté pour rendre compte de la noirceur des âmes et de la détresse qui habitent les personnages hantant les pages des Noyés.
Les Noyés
Scénario et dessin Nabiel Kanan
La Boîte à bulles, 2006 – 96 pages n & b – 13,50 €
[Chronique parue dans l'Ours Polar n°39 - Octobre 2006]
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