Un miracle serait-il en train de se produire ? Un éditeur se déciderait-il enfin à éditer l’intégralité de l’excellent Chicanos, une des bandes les plus originales du duo argentin ? Après une publication partielle par Vents d’Ouest en 1997 (Chicanos, 192 pages) et par Albin Michel en 2002 (Tabasco blues, 84 pages), il semblerait que cette fois-ci soit la bonne, et qu’Erko s’attaque vraiment aux quelques 400 pages de la vie tumultueuse d’Alejandrina Yolanda Jalisco, détective privée absolument hors norme. Hors norme car comme l’indique justement le titre de ce premier volume, ce n’est pas tous les jours qu’on rencontre une privée, qui plus est difforme, pauvre et mexicaine. Trillo et Risso ont créé là un personnage qui n’est pas loin d’être l’archétype du souffre-douleur, de la pauvre fille dont personne ne veut, cible de toutes les moqueries. Et que tout le monde prend plus facilement pour la femme de ménage que pour une pro de la détection… ce qui peut avoir certains avantages pour passer inaperçu pour mener ses enquêtes ! Au-delà des affaires, le plus souvent sordides, et qui ne rapportent que plaies et humiliations en guise de paiement à la pauvre Jalisco, il est aussi permis de lire Chicanos comme un regard sur la condition mexicaine - et celle de la femme - aux Etats-Unis. Mais ne croyez pas vous coltiner un pensum à la lecture de cette remarque : il s’agit bien de polar, du plus noir qui soit, par un autre grand du noir et blanc. Et Trillo a insufflé suffisamment d’humour à ses petites tranches de vie – l’album est découpé en 8 épisodes de 12 planches – pour faire de cette série une œuvre tout à fait à part dans le genre et de Jalisco un personnage qui marque durablement la mémoire.
Août 2009 - Retour sur cette chroniquePas de miracle pour Jalisco ! A peine commencée, la série s'arrête au n°1, fautes de ventes suffisantes. Il ne reste plus au fan qu'à se procurer le tome 2 paru chez IDW, en anglais, pour suivre les déboires de cette détective pas comme les autres.
Chicanos, tome 1 - Pauvre, laide, détective privée Scénario Carlos Trillo et dessin Eduardo Risso Erko, 2005 – 98 p. N&B – 15 €[Chronique parue dans l'Ours Polar 37/38 - Juillet 2006]
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